La plupart des opérateurs de la finance, de la supply-chain ou du négoce veulent s’emparer de cette technologie pour sécuriser les transactions ou réduire les coûts.
Labeyrie qui va certifier pour Noël certains de ses saumons fumés norvégiens grâce à la blockchain, Walmart Canada qui l’utilisera pour gérer ses approvisionnements, Crédit Agricole CIB, HSBC et Standard Chartered qui lancent, sur cette base, une plate-forme de « trade finance » et même notre Gendarmerie nationale qui vient de sécuriser, grâce à elle, une transaction avec Europol… Pas une semaine ne se passe sans que la technologie blockchain ne montre de nouvelles applications dans le monde des affaires.
Si le Bitcoin et autres crypto-monnaies font rêver ou donnent des sueurs froides aux aspirants spéculateurs, les applications professionnelles de la blockchain sont prises très au sérieux par tous les grands opérateurs, financiers, commerciaux ou industriels de la planète.
Derrière cet engouement, il y a une promesse : celle de sécurisation et de contrôle mutuel des transactions grâce à la technologie. Une blockchain ou une chaîne de blocs contient, en effet, une version unique d’opérations successives à travers un registre numérique immuable horodaté et sécurisé, dont chacune des parties prenants détient une copie.
Chaque nouvelle opération redéfinissant ce registre, par exemple lors des différentes étapes de l’exportation d’un conteneur, il devient quasiment impossible à falsifier. Une technologie connue sous le nom de « grand livre distribué » ou Distributed Ledger Technology (DLT).
L’engouement se traduit dans les chiffres. Selon le cabinet IDC, les dépenses d’investissement dans la blockchain vont bondir, en 2019, de 88,7% dans le monde pour atteindre 2,9 milliards de dollars. Un chiffre qui devrait grimper à 12 milliards de dollars en 2022. « Il y a eu ces dernières années, une véritable « hype » tous azimut autour de la blockchain. En fait, on entre dans une phase de maturité et aux vrais usages, la blockchain privée dans des grosses opérations B2B cela marche très bien », explique, à Classe Export, Gilles Babinet, digital champion de la France auprès de la Commission européenne qui rappelle que Bruxelles travaille sur un projet de réglementation sur le sujet.
Négoce de matières premières, trade finance, gestion des chaînes d’approvisionnement ou du transport maritime, traçabilité pour agro-alimentaire, les médicaments ou encore les métaux, transactions sécurisées… tout exportateur va se trouver ces prochaines années confronté au sujet.
La promesse, qui reste encore à démontrer à grande échelle, est que la sécurisation à chaque étape d’une chaîne logistique complexe (expédition, entreposage, changement de transporteur, de pays, contrôle qualité, etc…) pourra être validée et certifiée sans tiers de confiance et à moindre coût.
Dans ce mouvement, les grandes entreprises, financières notamment, tendent à se regrouper. elle le font au sein de consortium partageant une même plate forme technologique développée par des sociétés spécialisées comme les américains R3, Ripple-mark et ConsenSys ou encore de grands opérateurs comme IBM, via notamment le projet Hyperledger.
Ainsi, dans le domaine de la « trade finance», un des consortium les plus en vue est Marco Polo qui rassemble notamment le Crédit agricole, ING, Standard Chartered ou encore Microsft et Oracle. Marco Polo vient d’être, cet automne, rejoint par Mastercard et Bank of America. Le groupement We.trade, basé sur une plate-forme IBM, regoupe, lui, notamment Société Générale, Natixis, Rabobank ou UniCredit.
Dans un autre domaine, celui du négoce des matières premières, une quinzaine d’opérateurs dont SGS, Shell, BNP Paribas, Crédit agricole ou Société Générale, ont créé, il y a un an, la plateforme Komgo. Situé à Genève, fonctionnant sur une technologie ConsenSys, Komgo propose deux applications : la vérification de l’identité des clients et une lettre de crédit digitale.
En attendant plus.
Pierre-Olivier Rouaud
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