L’éditeur spécialisé dans les logiciels de comptabilité et de gestion veut créer une rupture sur le marché. Avec en tête, l’argument prix.
Chercher la croissance en Afrique. Telle est l’ambition de l’éditeur de logiciel de comptabilité et gestion EBP. Cette PME de 50 millions de chiffre d’affaires, basée à Rambouillet (Yvelines), a décidé pour cela de s’implanter au Maroc avant, dans un second temps, de viser la Côte d’Ivoire. Au Maroc, EBP va ainsi débuter la commercialisation de ses logiciels dès ce mois de mars. L’aboutissement d’un processus lancé voilà 18 mois et conduit par Marie Amiot, directrice de la toute jeune Business Unit International de l’éditeur.
EBP a une position bien établie en France sur le segment des PME, du commerce ou des garages, l’entreprise affiche plus de 500 000 utilisateurs. Mais son marché arrive à saturation, d’où cette volonté de trouver un relais de croissance à l’international. « Nous avons cerné le marché marocain comme étant à fort potentiel, de part sa proximité linguistique, sa situation concurrentielle particulière et aussi l’évolution de la réglementation».
Ces dernières années, les lois de finance successives ont fortement incité les entreprises à informatiser leur gestion et leur comptabilité. Du côté du marché, l’offre des éditeurs marocains est encore peu développée. Quant aux éditeurs internationaux comme les groupes Sage ou Cegid, ils ont un positionnement prix élevé.
Pour conduire ce projet, l’entreprise francilienne s’est organisée en mode start-up avec une équipe de 5 personnes s’appuyant aussi sur les ressources de sa petite filiale espagnole, qui connaît une forte croissance (+20% en 2019).
« Afin de cerner, les besoins du marché, nous avons voulu partir du terrain » indique Marie Amiot qui a suivi durant la phase de conception de l’offre Maroc, un Executive MBA à HEC dont le mémoire était centré sur ce projet. « A partir de différents réseaux, nous avons pu nous appuyer sur un expert comptable à Casablanca qui a accepté de m’aider à constituer un « focus group » de 15 professionnels venant d’entreprises petites ou moyennes ».
Cette phase initiale de connaissance du marché a permis de valider l’idée qu’il y a avait une forte attente des PME, notamment en terme de prix, EBP se positionnant, comme en France, à des niveaux trois à cinq fois inférieurS au standard des grands éditeurs, selon Marie Amiot. Quant aux produits, indique-t-elle « nous avons voulu créer des produits spécifiques pour ce marché et non simplement adapter les logiciels EBP vendus en France ». Conformes, évidemment, au plan comptable marocain et intégrant les usages locaux, ces logiciels ont été développés entre la France, l’Espagne et le Maroc.
L’activité opérationnelle va s’appuyer sur un ingénieur commercial marocain en charge localement du plan d’affaire et d’une équipe de 11 téléconseillers, employés par une filiale de services déjà installée au Maroc, à Rabat.
Avec ce projet dont le budget total de conception et de lancement est inférieur à 1 million d’euros, «il est possible selon nous d’atteindre très vite des volumes conséquents. Le potentiel de marché est vraiment important et nous pensons être à l’équilibre dès l’année prochaine », espère Marie Amiot. Les ventes devraient vite se chiffrer en milliers d’unités, sans autre précision.
Coté déploiement chez les clients , « les entreprises marocaines sont encore réticentes au Saas, donc nous optons dans un premier temps pour des packs logiciels installés physiquement sur les ordinateurs de bureau». La distribution, quant à elle, va s’effectuer via un réseau de distributeurs informatiques agréés qui va s’étoffer peu à peu.
Un des risques essentiels reste celui du piratage « Nous sommes évidemment très conscients de cette pratique. J’ai moi-même trouvé des logiciels EBP français à 1 euro dans un souk au Maroc ! Nous avons choisi de l’assumer car nos produits sont peu onéreux pour une entreprise et au-delà du logiciel, ce qui compte pour le client, ce sont aussi les services que nous allons développer : support, conseil, voire formation.
Le démarrage du Maroc étant imminent, l’éditeur français s’active déjà sur le projet suivant, à savoir le lancement en Côte d’Ivoire prévu l’an prochain. « Dans ce pays, nous avons suivi à peu près la même méthodologie. Ce qui ressort de nos démarches à Abidjan, c’est que l’attente des PME ivoiriennes est encore plus grande qu’au Maroc ». Encourageant.
Pierre-Olivier Rouaud