On espère que ce ne sera pas le coup d’état de trop au Burkina qui sombre petit à petit dans une situation anarchique que de nouveaux militaires pensent pouvoir juguler. Beaucoup d’entreprises étrangères sont inquiètes depuis de nombreux mois d’une situation qui n’offre pas de visibilité. Mais peut-on sortir par le haut d’une situation aussi complexe et comment, pour les Français, peut-on rétablir la confiance perdue ?
L’inquiétude est grande dans la zone. Si le Burkina tombe, le Togo et le Bénin s’inquiètent, la Côte d’Ivoire tremble et le Niger transpire … Ce pays aux multiples frontières est une base idéale pour agir sur la zone. On passe d’un pays à l’autre sans le savoir, en quelques heures de 4×4 et un clin d’œil. A l’Est du Burkina les djihadistes se sont solidement enracinés en chassant la population. Dans ces provinces on estime qu’un habitant sur deux a fui vers la capitale Ouagadougou.
C’est la difficulté que rencontrent les dirigeants au pouvoir, contrôler un pays comme le Burkina est militairement compliqué. Pourtant c’est aussi le terrain de jeu des forces spéciales françaises dans la zone : au camp de Camboinsin, partagé avec l’armée Burkinabaise on trouve sans doute les militaires les mieux entrainés d’Afrique.
Le coup d’État récent sonne comme un aveu d’impuissance de la junte des militaires à juguler la montée en puissance de la violence et les raids des djihadistes. Les morts violentes sont en augmentation exponentielle, on arrive à 8000 décès à fin septembre soit 9 mois, contre moins de 6000 sur 12 mois l’année dernière.
Il suffit parfois d’une petite étincelle pour que le feu s’allume. Aujourd’hui le feu est attisé par l’inflation, la crise du blé et la hausse des coûts de toutes les matières premières, la difficulté d’approvisionnement en pétrole … C’est un cercle maléfique qu’il faut briser.
Le Président de Géocotton, l’entreprise française, 1er employeur du pays, a avoué son inquiétude. Ses nombreuses années de présence au Burkina lui laisse penser que ce pays agricole est parfaitement pacifique, mais que les Occidentaux ont totalement raté la transition économique du pays en soutenant des projets inutiles et corrompus.
Le sentiment anti-français est devenu une sorte de slogan agité pour les esprits simples qui permet aux militaires de détourner l’attention sur leur propre impuissance à maîtriser la situation et de désigner un bouc émissaire. Laissons les militaires agiter la Russie. Ce n’est pas les milices Wagner qui vont résoudre les problèmes, ce ne sont que des effets de manches.
Faut-il baisser les bras ?
Évidemment pas ! L’heure est venue d’être encore plus présent, avec humilité et sans condition. C’est un investissement sur le long terme, qui sera à l’évidence payant, si on arrive à trouver une sortie par le haut. La question de la présence militaire française sur place et les questions sur son efficacité sont depuis plusieurs mois sur la table. La nécessaire réorganisation tarde à arriver, mais tout le monde sent bien qu’il faut changer de méthode.
Il va falloir être inventif, être présent sans attirer la lumière, changer de méthodes militaires, se mettre à l’écoute des populations, devenir de vrais alliés, sans exiger des contreparties.
C’est ce qu’en Afrique on attend des véritables amis.