En désirant reprendre en main leur destin, les pays africains font preuve de la sagesse de l’éléphant face à une situation qui semble sans issue et qui donne l’impression que l’occident profite de richesse de l’Afrique, sans que la condition des peuples s’améliore.
Mali, Burkina Fasso, Niger, Gabon, la situation dans ces pays est très différente et ne mérite pas la même attention de notre part, ni la même analyse. Mais l’enchainement des séquences met en valeur la tendance de fond à l’émancipation et au besoin de justice, même si elle est largement manipulée par les réseaux sociaux abreuvés de fake news distribués par d’autres puissances qui veulent rafler la mise.
Le Gabon est un cas à part. Destitué par des militaires proches du pouvoir, qui ont largement profité du système, la fin de la dynastie Bongo est sur le fond une bonne chose pour le pays. C’est un tripatouillage des urnes de trop, réalisé par un président fantoche, qui a fait un mauvais AVC et qui a été manigancé par une première dame et son entourage qui n’avait ni la capacité ni la légitimité pour gouverner le pays. Le calme qui règne à Libreville et la facilité de ce coup d’état militaire démontrent la fragilité du pouvoir Bongo, mais interroge sur la capacité des militaires à organiser la suite.
Sommes-nous responsables de la situation ? Car elle est connue de tous, et a empiré d’année en année ? La réponse est complexe, car une ancienne puissance coloniale ne peut se permettre l’ingérence dans les pays qu’elle a dominé il y a 60 ans. La réponse est non … mais … si…, bien évidemment.
Le silence assourdissant de la France pendant des années sur le sujet était en contradiction totale avec le discours politique du Président Macron, qui a bien senti qu’il fallait changer de posture, mais qui n’a pas pu mettre en action le nouveau deal espéré entre la France et l’Afrique.
Le plus inquiétant par rapport à la situation gabonaise est que la situation pourrait rapidement se répéter pour des raisons similaires, au Cameroun, au Congo et dans d’autres pays ou les dirigeants, à bout de souffle n’ont pas su organiser la relève.
L’analyse est facile, la solution difficile.
La difficulté provient également de l’absence en Afrique de contre-pouvoir ou d’instances pouvant réguler ce type de situation. Pour le Mali, le Burkina et le Niger la non-réactivité constatée de la CDEAO est inquiétante, car elle démontre la non-maturité de l’institution.
La première conclusion pour la France est qu’il y a urgence pour réformer totalement nos moyens d’action en Afrique. La non-visibilité de notre politique est flagrante. Nous sommes pour l’Europe le principal financeur de l’Afrique, mais notre action est totalement invisible des populations. Nous ne traitons qu’avec des états sur de très gros projets qui sont essentiels … mais les gouvernements financés s’approprient le bienfondé de l’action au détriment du financeur qui fait un excès d’humilité et qui disparait.
Les Allemands avec GIZ ont mis en place une double politique avec KFW les grands projets avec GIZ une politique de proximité. Proche du terrain, ces derniers favorisent ou financent des petits moyens projets qui ont un impact local important et où ils sont connus et identifiés.
La deuxième conclusion est qu’il faut former les futures élites de ces pays. La plupart des dirigeants au pouvoir ont été formés en France, notre influence proviendra pour beaucoup des réseaux que vont se constituer la génération suivante. Une politique migratoire doit pouvoir différentier les clandestins, des élites intellectuelles de ces nations et de pouvoir les attirer.
Dans tous les cas de figure, la France et les entreprises françaises en Afrique doivent garder une posture constructive et positive, comme dans la réalité, elles s’y emploient au quotidien. Coordonner la communication et se concentrer sur l’impact auprès des populations permettra de faire connaître cette action invisible, mais réelle.
La 3ème conclusion est qu’au niveau des acteurs économiques, il faut prendre nos responsabilités et organiser le partage des richesses avec la population africaine. Il n’est pas acceptable, par exemple, que dans la filière cacao, le producteur représente en valeur moins de 10% de la valeur du produit fini. Ce n’est pas le tout d’avoir un savoir-faire, il faut le faire savoir et se placer en cohérence avec son discours.