Un nouveau décret permet aux gros consommateurs d’acheter directement leur électricité à des producteurs indépendants. De quoi soutenir le plan de développement du secteur électrique, chiffré à 135 milliards de dollars d’ici à 2030.
C’est parti ! Au Vietnam, le gouvernement vient d’autoriser le mécanisme de contrat d’achat direct d’électricité (DPPA) par les gros consommateurs. Cette disposition résulte d’un décret signé par le vice-Premier ministre Tran Hong Ha le 3 juillet dernier, publié le lendemain. Elle est rétroactive au 3 juin 2024.
Ce décret est une étape clé pour le développement des producteurs privés d’électricité, en particulier d’origine renouvelable, qui pourront désormais investir dans les capacités dédiées à des clients dans l’industrie ou l’immobilier.
Le décret limite, toutefois, cette possibilité aux consommateurs d’électricité ayant un niveau de tension de connexion de 22 kW et plus et une consommation d’au moins 200 000 kWh par mois. De plus, ces consommateurs ne pourront pas conduire d’activités d’achat – revente et devront se limiter à la couverture de leurs besoins propres. Des mécanismes destinés à donner de la souplesse au système comme les contrats à terme ou la mutualisation des achats sont toutefois autorisés.
De quoi attiser un peu plus l’intérêt des entreprises françaises déjà présentes sur le marché comme EDF Renouvelables, Greenyellow ou TotalEnergies.
Presque toutes les formes de production d’électricité sont autorisées dans ce cadre (sans préjuger des autorisations administratives, par ailleurs) : photovoltaïque, éolien, petite hydroélectricité, biomasse, géothermie, énergies marines…
Les nouvelles dispositions constituent une petite révolution au Vietnam, où jusque-là l’entreprise publique EVN (Électricité du Vietnam) était en situation de monopole pour la vente.
Attendues de longue date par les investisseurs et les consommateurs, ces décisions s’inscrivent dans le cadre d’un vaste plan stratégique publié le 15 mai 2023 connu sous la référence No. 500/QD-TTg. Ce document aussi dénommé PDP8 (Power Development Plan VIII) fixe, après plusieurs années de travaux, la stratégie électrique du pays pour la période 2021 – 2030, avec une vision à horizon 2050. Il prend en compte l’articulation de la politique électrique du pays avec l’Accord de Paris et un objectif ultime net zéro pour 2050. Très complet, ce document de 78 pages prévoit que la capacité électrique installée du Vietnam passera de 69 GW en 2020 à 150 GW d’ici à 2030. Quant au total des nouveaux investissements en capacité de production, réseaux de transport et de distribution, il est estimé par le gouvernement à 134,7 milliards de dollars !
Les renouvelables devront, à l’horizon 2030, peser près de 50 % du mix énergétique, dont 18,5 % d’énergie éolienne (très peu développée aujourd’hui) et 8,5 % de photovoltaïque. Quant à l’hydroélectricité qui représente aujourd’hui 30 %, sa part relative devrait diminuer à 19,5 %.
Dans le cadre où les financements internationaux massifs seraient déployés dans le cadre des Partenariats pour une transition énergétique juste (Just Energy Transition Partnerships, JETP) abondés par les grands pays industrialisés, la part des renouvelables pourrait même atteindre 66,5 %, selon les projections des pouvoirs publics.
Du côté des énergies carbonées, le charbon continuera de jouer un rôle important dans le mix, mais passera de 31 % actuellement à 20 % d’ici 2030. Quant au gaz naturel, il représentera 24,8 % du mix énergétique avec une capacité installée de 37,33 GW en 2030 contre 9 GW seulement actuellement. A ce titre, le gouvernement a déjà identifié une douzaine de projets électriques de plus de 1 500 MW à base de gaz naturel destinés à être développés d’ici à 2030.
A noter que dans le cadre de ce plan, les échanges d’électricité du Vietnam avec les autres pays de l’ASEAN (la sous-région du Grand Mékong en particulier) devraient connaître une forte croissance. Ce qui, là encore, nécessitera un fort développement des capacités d’interconnexion.