Le Mercosur, la communauté économique qui regroupe l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay, est un marché commun de l’Amérique du Sud, créé par le traité d’Asuncion en 1991, afin d’établir une véritable union douanière avec un tarif extérieur commun. Il s’agit de la plus grande association commerciale et économique d’Amérique du Sud.
Fin juillet l’annonce du ministre uruguayen des Affaires étrangères, Francisco Bustillo, indiquant que son pays allait lancer des négociations commerciales officielles avec la Chine, a une fois de plus créé des tensions au sein de la communauté. Cet accord déplait à certains membres du marché sud-américains et ce n’est pas la première fois que les déclarations du président uruguayen font grincer des dents. En mars 2021 notamment, Luis Lacalle Pou avait averti que le bloc devait s’ouvrir au monde pour ne pas devenir un fardeau. La remarque avait provoqué l’exaspération de son homologue argentin, Alberto Fernandez, qui lui avait indiqué que l’Uruguay était libre de quitter le Mercosur s’il le souhaitait. Lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères du Mercosur le 20 juillet dernier, certains ministres ont souligné l’importance de négocier en bloc, conformément aux règles du Mercosur qui exigent que les pays membres négocient de tels accords par consensus. Les accords commerciaux seuls seraient donc « faussés » et « beaucoup plus coûteux pour nos capacités nationales et régionales », a déclaré le ministre argentin des affaires étrangères, Santiago Cafiero.
Malgré cette opposition, le président uruguayen a annoncé que son pays allait officiellement entamer les négociations avec le géant asiatique, qui est déjà son premier partenaire commercial, tout en réaffirmant son attachement au Mercosur et en invitant les autres membres du bloc à se joindre à ces discussions.
L’Asie est déjà un important partenaire du Mercosur en matière de commerce et d’investissements, et en 2021, les exportations du bloc latino-américain vers Singapour se sont élevées à 5,9 milliards de dollars et les importations à 1,2 milliard. Depuis des années, Pékin cherche à resserrer ses liens commerciaux avec les marchés émergents d’Amérique du Sud, pour s’assurer des matières premières telles que les céréales ou le pétrole, pour maintenir sa propre économie en pleine croissance. L’accord envisagé par l’Uruguay et la Chine prévoit une diversification des échanges commerciaux et une plus grande facilité pour les investissements des deux parties. Pour le géant asiatique, un accord de libre-échange avec l’Uruguay, représenterait donc une porte d’entrée vers le Mercosur et ses 265 millions d’habitants.
De son coté la Commission européenne a aussi repris des contacts. L’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays d’Amérique latine est gelé depuis 2019, notamment en raison de craintes sur son impact environnemental. Emmanuel Macron avait fait savoir qu’il s’opposait au texte en l’état, officiellement parce que le Brésil n’avait pas respecté l’engagement de contenir la déforestation en Amazonie.
La crise alimentaire et énergétique provoquée par la guerre en Ukraine a attiré l’attention mondiale sur l’Amérique du Sud, une des régions leaders en exportation de grain. Les présidents des quatre pays du Mercosur sont d’accord sur le fait qu’ils se trouvent face à une bonne occasion, mais ils divergent sur la manière d’en profiter et avec quel partenaire.