Le pays vient de se doter d’un Startup Act inspiré notamment de l’expérience tunisienne. Il crée un statut ad hoc pour les jeunes pousses, ainsi que diverses incitations fiscales. Objectif : labelliser et aider 60 entreprises innovantes par an. En s’appuyant sur des structures comme l’incubateur Hadina RIMTIC à Nouakchott.
Encore émergent, l’écosystème des jeunes pousses en Mauritanie vient de se voir doter d’un nouveau cadre législatif sur mesure. Le 7 septembre dernier à Nouakchott, le conseil des Ministres, sous la présidence du chef de l’Etat Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani, a en effet adopté le « Startup-Act », le tout premier projet de loi dans ce domaine. Présenté par Mohamed-Abdallahi Louly, ministre de la Transformation Numérique, de l’Innovation et de la Modernisation de l’Administration, le projet de loi a été voté par le Parlement, dans la foulée, deux jours après.
Le texte a été préparé ces dernières années par plusieurs ministres successifs. Le titulaire du poste, nommé en juillet dernier à l’occasion d’un large remaniement, n’a eu aucun mal à reprendre le flambeau. Mohamed-Abdallahi Louly connaît bien le secteur pour être lui-même fondateur et ancien PDG, d’une des plus importantes ESN du pays, GTI international.
Le Start-up Act crée un environnement juridique pour faciliter le lancement et le développement des PME innovantes. Il repose notamment sur un système de labellisation, par une commission ad hoc public-privé, pour les startups répondant à certains critères fixés par la loi.
Le but du texte est de développer l’écosystème d’innovation et de l’entrepreneuriat, de favoriser l’adoption du numérique dans les entreprises et de dynamiser en particulier le secteur du commerce électronique et des plateformes numériques. A terme, il s’agit de faire émerger des startups majeures et des champions nationaux. En la matière, il y a de la marge. Selon le « Digital Readiness Index » 2021 établi par Cisco, la Mauritanie est classée 130ème sur 146 pays en matière d’environnement pour les startups (contre 84ᵉ pour son voisin le Maroc).
L’objectif -assez ambitieux- des pouvoirs publics, est désormais de parvenir à 60 startups labellisées par an, soit 300 sur cinq ans. Avec, sur la même période, la création d’un cumul de douze structures d’appui labellisées (incubateurs, fonds d’amorçage, etc..) et 3 000 emplois créés.
Pour cela, diverses incitations sont mises en place, dont un régime fiscal simplifié, une exonération de la patente pendant trois ans ou encore une exonération d’une part de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt sur les bénéfices d’affaires des personnes physiques pendant la durée du label, fixée à cinq ans. A ceci s’ajoute notamment un cadre incitatif pour les investisseurs nationaux ou étrangers à travers des exonérations fiscales pour ceux qui investissent dans une start-up labellisée ou dans un fonds qui investit principalement dans des start-ups labellisées. En matière de structures de financement, la nouvelle loi envisage aussi la création d’un fonds d’appui aux startups et de soutien à l’innovation, financé par l’Etat, des investisseurs privés et autres bailleurs de fonds internationaux. Comme pour beaucoup de dispositions du Startup Act, les modalités de financement, de gestion et d’accès au fonds doivent encore être définies par voie réglementaire.
Pour favoriser l’emploi, seront aussi mis en place des contrats de travail spécifiques et certaines exonérations des charges patronales et sociales. En termes d’équipement informatique, le texte prévoit également des exonérations fiscales et des facilitations administratives relatives à l’importation de matériel informatique. Par ailleurs, l’accès aux données publiques (Open Data) ou aux marchés publics sera favorisé pour les entreprises labellisées.
La préparation du projet de loi a bénéficié du soutien financier du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Un benchmark a été réalisé, par ailleurs, par des consultants sur le cadre existant pour les startups dans d’autres pays, dont la Tunisie, particulièrement en pointe en la matière. Le processus de « co-création » avait été lancé formellement en mars 2022 avec une task force réunissant des acteurs privés et publics, dont Mariem Kane, directrice de l’Innovation au Ministère de la Transition Numérique et elle-même fondatrice en 2014 de Hadina RIMTIC, le principal incubateur du pays. Celui-ci est le lieu d’accueil de nombreuses initiatives dont, cette année, le programme D-CLIC, initié par l’Organisation Internationale de la Francophonie qui a permis de former au numérique une centaine de jeunes. A noter enfin que le gouvernement travaille désormais sur la création d’un statut d’auto-entrepreneur qui doit encourager le secteur formel et promouvoir l’entrepreneuriat chez les jeunes.