Ras Al Khaimah, un des sept Émirats arabes unis vient d’inaugurer une zone franche dédiée aux Web+, la blockchain et autres cryptos actifs. Mais la concurrence sera rude à côté des pôles dédiés d’Abou Dhabi qui vient de revoir entièrement son cadre réglementaire, et de Dubaï.
En germe depuis ce début d’année, le projet est désormais officiellement lancé : Ras Al Khaimah, une des sept entités des Emirats Arabes Unis, vient de se doter d’une zone franche centrée sur les actifs virtuels régulés ou non. L’inauguration de cette zone franche, nommée Ras Al Khaimah Digital Assets Oasis, ou « RAK DAO », s’est déroulée le 19 octobre dernier lors d’un événement ouvert par Saoud ben Saqr Al Qassimi, l’Emir de Ras Al Khaimah, un territoire situé à une heure de route au nord de Dubaï. RAK DAO entend accueillir les entreprises engagées dans des technologies telles que le métaverse, la blockchain, les jetons utilitaires, les cryptos actifs, les jetons non fongibles (NFT), les organisations autonomes décentralisées (DAO) et autres applications décentralisées (DApps).
Le cadre juridique de la zone a été établi en mars dernier à travers la loi No. 2 de 2023. Il est complété par un ensemble de règles de droit commercial ad hoc.
En termes d’avantages directs, les entreprises et leurs filiales enregistrées à RAK DAO, ainsi que leur personnel ou les entreprises individuelles, seront exonérés de toutes taxes liées à leurs opérations au sein de la zone franche. Elles devront toutefois au préalable s’acquitter d’une licence de quelques milliers de dollars. Par ailleurs, la réglementation de la zone n’impose aucune contrainte liée à l’actionnariat local, à l’inverse des règles de droit commun aux Emirats Arabes Unis. Les sociétés enregistrées à RAK DAO pourront être détenues à 100% par des entreprises ou ressortissants étrangers. A noter qu’une présence physique n’est même pas nécessaire, trois catégories de licences ayant été mises en place : entreprise standard, freelance individuel et donc entreprises à distance.
Si ce cadre très libéral paraît attractif, la compétition sera rude pour la nouvelle zone franche qui à ce jour n’a encore dévoilé le nom d’aucune entreprise s’y étant installée. Des Îles Caïman aux Philippines en passant par le Belarus ou même la Suisse (canton de Zoug) les projets de zones spéciales pour les cryptos actifs ont tendance à fleurir sur la planète Pour RAK DAO, la concurrence est surtout immédiatement proche.
A ce titre, ADGM (Abu Dhabi Global Market), le centre financier d’Abu Dhabi s’intéresse de très près aux actifs virtuels. Le plus riche des émirats a commencé à mettre en place le 25 juin 2018 des dispositions pour favoriser ces activités, mais leurs règles d’exercice demeuraient peu précises. ADGM vient, en la matière, de franchir une étape majeure avec la mise en place, annoncée ce 3 novembre, d’un régime juridique complet conçu pour répondre aux attentes des fondations de blockchain, des DAO et de toute cette industrie cryptographique. Dénommé « Distributed Ledger Technology (DLT) Foundations Regulations 2023 » ce texte officiel applicable depuis le 2 octobre se présente comme le plus avancé au monde. Il devrait, selon les experts, susciter l’intérêt pour le centre financier d’Abou Dhabi des grandes fondations de blockchain de type Ethereum.
Quant à Dubaï, cet émirat se présente aussi comme une localisation de choix. Sa zone franche de services, Dubai Multi Commodities Centre (DMCC), une des plus importantes du monde avec 23 000 sociétés enregistrées a lancé au printemps 2021 un « Crypto Center ». Celui-ci cible l’écosystème des start-ups et entreprises de la blockchain et du Web3, les opérations de transaction restant, elles, soumises à autorisation spéciale.
Ce début d’année, les responsables de DMCC ont annoncé que plus de 550 entreprises du secteur étaient déjà enregistrées au « Crypto Center ».
Ras Al Khaimah aura donc fort à faire pour réussir le développement de RAK DAO, un des nombreux projets de l’émirat visant à diversification de l’économie, notamment à travers plusieurs zones franches, dont la principale est RAK Economic Zone. Situé dans le nord de la fédération, Ras Al Khaimah s’étend sur 2 486 km2 en deux territoires non-continus. Sa population est estimée à 345 000 personnes pour un PIB de 10,9 milliards de dollars en 2022. Dépourvu de ressource pétrolière, l’Émirat a lancé depuis plusieurs décennies une stratégie économique orientée vers les services, l’immobilier, le tourisme et aussi l’industrie (ciment, verre, céramique…), activité qui pèse 29% du PIB. Selon Fitch, l’économie de l’émirat devrait bondir de 5.1% en 2024, après une hausse de 4,4% cette année.