Le texte remet à plat l’ensemble des soutiens aux investissements et dessine la politique industrielle du royaume. Les aides peuvent atteindre 30% des projets.
Cette fois-ci c’est la bonne ou presque. La Charte de l’investissement du Maroc est pleinement opérationnelle, suite à la signature des derniers décrets d’application (n°2-23-1), début mars, par le chef du Gouvernement Aziz Akhannouch.
La loi cadre n° 03-22 publiée le 9 décembre au Bulletin officiel remet à jour l’ensemble des dispositifs d’aides et soutiens à l’investissement, que ce soit pour les entreprises marocaines ou étrangères. Elle abroge la charte précédente (loi-cadre n° 18-95 du 8 novembre 1995). Il s’agit d’un texte majeur qui oriente la politique industrielle du royaume et cherche aussi à orienter les investissements vers les régions moins favorisées que les grands pôles économiques du Royaume (Casablanca, Tanger, Rabat, Fès, etc.).
Point clé pour les investisseurs non marocains, la charte réaffirme aussi la garantie de rapatriement des capitaux en devises provenant d’investissements étrangers au Maroc.
En matière de critères, pour pouvoir prétendre aux aides, l’investisseur devra au moins créer 150 emplois permanents, sans plancher de montant investi, ou bien investir au moins 50 millions de dirhams (4,5 millions d’euros) pour un minimum de 50 emplois permanents créés.
La charte détaille cinq types de primes communes cumulables, dont la première, d’un montant allant de 5 à 10% de l’investissement se rapporte aux emplois créés et au capital engagé. Une seconde prime est liée au genre et s’élève à 3% si la masse salariale féminine dépasse 30% du total. Un troisième type de prime porte sur les « métiers d’avenir » (biotech, 5G, automobile, véhicule électrique, fintech, aéronautique, ferroviaire…) et s’élève à 3 %. Une quatrième prime se rapporte à des critères de développement durable (économie d’énergie, énergies renouvelables, etc..), l’entreprise devant obligatoirement mettre en place de mesures d’économie ou de recyclage de l’eau pour y prétendre. Enfin la cinquième prime, de 3% également, porte sur le niveau d’intégration locale.
Pour être éligible, une entreprise doit conduire une activité dont le taux d’intégration locale (achats de biens et services au Maroc) dépasse 20% pour l’agroalimentaire ou la santé et 40% pour toute autre activité industrielle.
A ces cinq primes, s’ajoute une prime territoriale accordée pour encourager l’investissement dans les provinces les moins favorisées avec un taux d’aide allant de 10% (36 provinces dites A) à 15% (24 provinces dites B), selon les zones.
Enfin, une prime sectorielle peut être accordée pour les investissements réalisés dans des secteurs dits prioritaires : tourisme, industrie, numérique, transport, outsourcing, logistique, activités culturelles, aquacultures, énergies renouvelables et valorisation des déchets. Cette prime s’élève à 5% de l’investissement éligible réalisé.
L’ensemble de ces primes peut être cumulé jusqu’à atteindre 30% d’un projet. Les investissements dans le domaine du commerce, de l’agriculture et de l’immobilier ne relèvent pas des dispositions de la Charte de l’investissement.
A noter que la prise en compte du foncier dans le total des investissements primables fait l’objet d’un traitement particulier. En cas de location, par exemple, les dépenses éligibles sont plafonnées à sept ans de loyers.
Le traitement des dossiers s’effectue par les Centre régionaux d’investissement (CRI), voire directement par l’Agence Marocaine de Développement des Investissements et des Exportations (AMDIE) ou le ministère concerné pour les très gros dossiers structurants.
Concernant ces projets à caractère stratégique, à l’image des méga investissements de Renault ou Stellantis par le passé, des avantages spécifiques pourront être négociés avec l’Etat.
Un comité ministériel ad hoc jouera un rôle de traitement de ces très gros dossiers et aussi de contrôle de l’application de cette charte.
Diverses mesures de stratégie économique nationale doivent être précisées ces prochaines années, comme l’accès des PME au financement, au foncier et à la commande publique ou encore le soutien de l’État à l’internationalisation des entreprises marocaines.
Avec l’ensemble de ces dispositifs, le Maroc entend poursuivre l’élan des quinze dernières années qui a fait du royaume un des principales terres d’accueil des investissements industriels en Afrique et radicalement transformé son économie. Avec de nouveaux enjeux comme la décarbonation, sujet sur lequel travaille activement le ministre de l’Industrie, Ryad Mezzour.