En marge des sujets de sécurité sur Gaza ou l’Ukraine, les chefs d’État et de gouvernement ont ainsi réaffirmé leur plein soutien à divers mécanismes de financements des infrastructures en Afrique, notamment les initiatives de la BAD et aussi celles décidées lors de précédents G7. Une réunion spéciale coprésidée par Joseph Biden et Giorgia Meloni s’est même tenue en marge du sommet avec au menu la déclinaison en Afrique du Partenariat du G7 pour les infrastructures mondiales et l’investissement (PGII).
Lancé en 2022 sur une initiative américaine, le PGII se veut (tout comme Global Gateway, le programme de financement extérieur de l’Union européenne) être le pendant des Routes de la soie chinoises avec une cible de 700 milliards d’investissement soutenus directement ou indirectement d’ici à 2027 à l’échelle mondiale (Afrique, Amérique latine, Asie…). Washington indique avoir déjà permis, par effet de levier ou subventions, 60 milliards de dollars d’investissements dans le monde dans ce cadre. Parmi les projets phares soutenus par les États-Unis et le PGII figure la rénovation et l’extension du corridor ferroviaire de Lobito (ou Benguela) en Angola. Cette infrastructure clé de 1 344 kilomètres doit désenclaver les mines de cuivre et de cobalt de la Copperbelt (RDC et Zambie) en les reliant à l’Atlantique et au port de Lobito. Le corridor de Lobito, un projet conduit en PPP sur trente ans, a été attribué en novembre 2022 au trader, basé à Singapour, Trafigura, au groupe portugais de BTP Mota-Engil et à l’entreprise belge d’exploitation ferroviaire Vecturis. Il est fortement appuyé par les États-Unis, via l’agence de développement DFC ainsi que par l’Union européenne. A ce propos, l’Italie a déclaré lors de cette réunion du G7 qu’elle allait mobiliser pour sa part une contribution pouvant atteindre jusqu’à 320 millions de dollars pour soutenir l’infrastructure ferroviaire principale de Lobito et les projets secondaires connexes. Ceci notamment en vue de créer des synergies avec les projets soutenus par la BAD dans le cadre de l’Alliance pour l’infrastructure verte en Afrique (AGIA) initiée voilà deux ans. Ce concours de l’Italie sur Lobito intervient dans le cadre d’un regain d’intérêt de ce pays pour les projets en Afrique à la suite du plan Mattei (MPA – Mattei Plan for Africa) lancé par Giorgia Meloni lors du sommet Italie-Afrique de fin janvier à Rome.
Pointant les efforts soutenus de la BAD en matière de projets d’infrastructure, Akinwumi Adesina,a rappelé aux dirigeants du G7 que la banque avait investi « plus de 50 milliards de dollars dans des infrastructures de qualité » en Afrique ces huit dernières années. Selon lui toutefois, « l’Afrique [conserve] un déficit de financement des infrastructures de 68 à 108 milliards de dollars par an. Il faut y remédier pour réaliser l’ambition de l’Afrique, fortement soutenue par le G7, de devenir une grande puissance économique mondiale ». Les dirigeants du G7 ont pour leur part salué l’AGIA comme « plateforme clé de collaboration sur les investissements dans les infrastructures en Afrique » Et lors du sommet italien, ils ont annoncé un premier soutien financier de 150 millions de dollars. La déclaration finale du Sommet indique ainsi : « En tant que G7, nous contribuerons collectivement jusqu’à 150 millions de dollars en subventions, en capitaux concessionnels et commerciaux à l’AGIA et nous prévoyons de contribuer à mobiliser jusqu’à 3 milliards de dollars d’investissements du secteur privé dans les infrastructures vertes en Afrique« . L’AGIA a été, pour rappel, lancée lors de la COP 27 à Charm el-Cheikh, en Égypte, par la Banque Africaine de Développement, la Commission de l’Union africaine, le fonds Africa50 et d’autres partenaires financiers et institutionnels. Elle s’est traduite en février dernier par la création d’un premier fonds dans lequel la BAD a injecté 500 millions de dollars. Dénommé AGIA-PD, celui-ci veut à moyen terme mobiliser directement ou indirectement dix milliards de dollars de financements pour accélérer la transition de l’Afrique vers le zéro émission nette.
Outre Lobito, sur lequel la BAD s’est engagée à hauteur de 500 millions de dollars pour financer l’extrémité zambienne du corridor, Akinwumi Adesina a cité lors du G7 italien une série de projets soutenus par la banque panafricaine « pour changer la face de l’Afrique ». Il s’agit notamment du cofinancement (1 milliard de dollars) du corridor de transport de 1110 km qui relie l’Éthiopie au Kenya (Nairobi et Mombasa), du cofinancement du corridor ferroviaire central qui relie la Tanzanie, la RDC et le Burundi (3,2 milliards de dollars par le biais de la titrisation), du cofinancement (213 millions de dollars) de la ligne de transport d’énergie reliant la Mauritanie et le Mali et encore du pont de Rosso reliant le Sénégal et la Mauritanie. Cependant, selon le président de la BAD, « le manque de projets bancables, qui est lié à une insuffisance de facilités de préparation de projets » reste un défi majeur. Dans un autre registre, l’Italie et les États-Unis ont indiqué, en outre, vouloir poursuivre leur collaboration bilatérale sur des projets d’énergie propre, d’agriculture durable et d’e-mobilité, avec en ligne de mire des dossiers potentiels au Kenya. Dans une déclaration commune, les dirigeants du G7 ont également souligné leur engagement à renforcer la coordination entre le PGII, le MPA italien et le plan Global Gateway de l’Union européenne « afin de maximiser notre impact collectif alors que nous travaillons à développer des corridors économiques transformateurs en Afrique ». Sur une initiative italienne, les dirigeants du G7, en ce sens, ont approuvé la constitution d’un nouveau secrétariat permanent du PGII pour améliorer la coordination des investissements entre pays membres. Enfin, les dirigeants du G7 ont lancé une nouvelle initiative en matière d’énergie (« Énergie pour la croissance en Afrique »). Celle-ci vise à « développer des projets d’énergie propre bancables, à attirer des capitaux privés grâce à une utilisation catalytique des finances publiques et de l’assistance technique, encourager le flux de financements concessionnels et surmonter les obstacles aux investissements dans les énergies propres à travers l’Afrique« . Restant à préciser, cette initiative qui s’ajoute aux nombreux programmes multilatéraux sur le sujet, sera développée en coordination avec le PNUD et l’AIE.