En France, le transport terrestre de marchandises est essentiellement réalisé par la route 90 %. Le transport ferroviaire est de 8 % et 2 % pour le transport fluvial. Ces flux de marchandises contribuent pour plus de 10% dans les émissions totales de CO2 de la France (tous secteurs confondus). Il est donc vital de reporter les flux de la route vers les modes de transport les moins émetteurs. Il est reconnu que l’efficacité énergétique du transport intermodal est de 3 à 4 fois supérieure à celle du transport routier et des gains significatifs peuvent être réalisés en termes d’émission de CO2 grâce aux nouvelles motorisations décarbonées (Hydrogène, GNV, Electrique).
Alors pour les néophytes, qu’est-ce que l’intermodalité ? L’intermodalité est un concept qui se réfère à l’utilisation de différents modes de transport pour effectuer un trajet. Il s’agit de la combinaison de deux ou plusieurs modes de transport différents. Par exemple, le maritime, le train, les péniches, le camion afin de couvrir un trajet d’acheminement complet de marchandises d’un point A à un point B.
L’objectif de l’intermodalité est d’optimiser les déplacements en combinant les avantages de chaque mode de transport pour offrir une solution de transport globale plus efficace et plus écologique. Par exemple, en combinant fluvial avec le camion et en mutualisant les flux entre chargeurs, on peut réduire les coûts de manutention et l’empreinte environnementale. L’intermodalité nécessite cependant une organisation différente au transport monomodal. Il faut adopter une coordination efficace entre les différents modes de transport impliqués, ainsi que des infrastructures et des services logistiques adaptés pour faciliter les ruptures de charge entre chaque mode. L’intermodalité est de plus en plus encouragée et promue par les gouvernements et les autorités locales dans le cadre de politiques de développement durable pour réduire les externalités négatives comme la pollution sonore, la congestion routière, les émissions de gaz à effet de serre et donc améliorer la qualité de l’air.
Cette vision presque idéaliste de l’intermodalité doit s’accompagner d’un changement de paradigme dans le fret de marchandises et ceci dans un timing contraint par l’accélération des changements environnementaux et par la flambée des couts des carburants résultant de la situation géopolitique actuelle.
Le temps presse car il n’y a pas actuellement sur l’Axe Seine, une organisation structurante, une vue unique de promotion et de développement de l’intermodalité. Des volontés économiques et politiques existent bel et bien, mais en ordre de marche dispersé avec des initiatives issues du domaine public, du domaine privé, des chargeurs, des collectivités locales, des transporteurs ou des bureaux d’études.
Le temps presse puisque contrairement au mode routier, les modes de transports massifiés souffrent d’une image, à tort, souvent désuète et peu efficace. Face à la saturation des infrastructures et aux contraintes sociales, il faut sortir d’une logistique standardisée en proposant des alternatives fiables et durables. C’est le défi réalisable de l’intermodalité.
Le temps presse devant le manque de structuration sur l’intermodalité au sein des organisations, il faut étendre le principe d’intermodalité absolue à tous les gestionnaires d’infrastructures, promouvoir les possibilités d’interactions logistiques sur les plateformes portuaires et logistiques. Les chargeurs doivent étudier les potentiels de basculement vers le report modal pour de nouvelles filières et anticiper la digitalisation des outils pour une optimisation des couts de la Supply Chain.
Le temps presse devant la problématique de pénurie de main d’œuvre dans le domaine de la logistique et du transport, le niveau de qualification pour intégrer le secteur logistique est passé du Bac pro au Bac +2/+3 pour les techniciens. Certaines entreprises demandent une licence professionnelle, ainsi que certains BTS et DUT et jusqu’au Bac+4/5. Les formations en transport intermodal doivent se spécialiser rapidement pour répondre à cette demande. Il faut pour cela travailler en amont à l’élaboration de plans de formations sur l’intermodalité, motiver l’interaction entre les organismes de formations et les entreprises pour les futurs stagiaires et la recherche d’emplois. Un support pédagogique moderne sur l’intermodalité à destination des chargeurs, des commissionnaires de transports, des transporteurs et des collectivités locales, c’est apporter une vision opérationnelle et une réponse forte aux contraintes logistiques du transport de marchandises.
Quels scénarios adopter pour développer le transport intermodal de marchandises ? Il faut tout d’abord une véritable volonté politique pour une promotion marketing et moderne de l’intermodalité. Ensuite il faut proposer des services innovants comme des études intermodales clé en main aux chargeurs (schéma logistique, aides disponibles, contacts avec les transporteurs et les gestionnaires d’infrastructures).
La phase initiale ou finale de transport par la route est inéluctable. Il ne faut donc pas opposer le transport par la route au transport ferroviaire ou fluvial, mais plutôt jouer sur leur complémentarité et regarder la solution intermodale comme la meilleure solution. De nouveaux enjeux se présentent comme la logistique urbaine conséquence du nouveau paradigme du e-commerce et la nécessité d’intégrer le transport de marchandises dans les politiques urbaines et locales. La nouvelle orientation numérique de la logistique aura un impact important sur la formation et l’emploi ainsi que sur la capacité des pouvoirs publiques et des collectivités locales à appréhender des techniques de travail différentes. En résumé, l’intermodalité, c’est développer des stratégies communes en mutualisant les flux. Ce sont aussi des bénéfices sur l’emploi et l’environnement grâce à l’optimisation des solutions logistiques.
Raynald Cavé
ACTH Normandie