« Viser la Lune, ca ne me fait pas peur. Même à l’usure j’y crois encore et en cœur » la chanson d’Amel Bent s’adapte finalement assez bien à l’actualité spatiale du moment. Les projets et objectifs clés liés à la Lune actuellement en cours, ou prévus dans un avenir proche, en témoignent.
Depuis la fin du programme Apollo en 1972 (le 14 décembre 1972, les astronautes de la mission Apollo 17 ont quitté la Lune. Depuis, plus aucun humain n’a foulé le sol du satellite de la Terre) jamais l’exploration de cet astre n’aura été autant au centre de l’actualité, et 2023 sera sans nul doute une année charnière pour les différents pays et opérateurs privés lancés dans la course.
Quatre d’entre eux seront au centre des radars dans les prochains mois:
- La société SpaceX, qui a annoncé son intention de construire une colonie sur la Lune d’ici 2024. Cette colonie, composée de plusieurs modules pressurisés reliés entre eux, pourra accueillir jusqu’à 100 personnes. L’entreprise, fondée par Elon Musk, a réalisé plusieurs progrès dans le cadre de ce projet, notamment le développement du véhicule de transport « Lunar Starship » et la réalisation de plusieurs vols d’essai réussis.
- La NASA, avec sa mission Artemis qui vise à renvoyer des humains sur la Lune d’ici 2024 et à établir une présence permanente sur cet astre d’ici la fin de la décennie. Artemis comprend plusieurs étapes, notamment le lancement de missions habitées vers la Lune, le développement de technologies pour créer des habitats viables sur place et l’exploitation de ses ressources. Les Etats Unis ont réalisé plusieurs progrès importants dans le cadre de cette mission, notamment le lancement du module de commande « Orion » et la mise au point de technologies pour créer des habitats viables sur la Lune.
- La Chine, qui vise à développer son programme spatial et à devenir une puissance spatiale de premier plan avec notamment une première mission habitée sur la Lune en 2029. Le pays a réalisé de nombreux progrès dans ce cadre, notamment avec le lancement de sa sonde lunaire « Chang’e 5 » et le développement de nouvelles technologies pour l’exploration lunaire. Elle est aussi, en janvier 2019, la toute première nation au monde à réussir à déposer un atterrisseur et un astromobile sur la face cachée de la Lune.
- La société Blue Origin, qui vise à établir une présence permanente sur la Lune d’ici 2030. L’entreprise, fondée par Jeff Bezos, a réalisé plusieurs progrès dans le cadre de ce projet, notamment le développement du véhicule de transport « Lunar Blue Moon » qui sera utilisé pour atterrir sur la Lune et pour emmener du matériel et du personnel sur cet astre et la réalisation de vols d’essai réussis.
Certes, l’Union européenne (qui a mené des missions robotiques sur la Lune), l’Inde, qui a également réalisé des missions sur la Lune (avec notamment « Chandrayaan-1 » en 2008 et la mission « Chandrayaan-2 » en 2019), la Russie, qui a mené des missions habitées vers la Station spatiale internationale, ou le Japon qui a conduit des missions robotiques et a participé à la construction de la Station spatiale internationale, sont aussi sur les rangs, mais il y a fort à parier que dans les prochains mois l’un de ces quatre opérateurs fasse l’actualité. Les retombées pour le grand gagnant ne seront pas seulement en terme d’image, mais elles seront sans doute aussi financières à plus long terme.
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles l’exploration de la Lune et l’établissement de colonies sur cet astre peuvent être intéressants sur le plan économique (d’où l’expression d’ « économie lunaire »). Les principales sont, là aussi, au nombre de quatre :
- La Lune est riche en ressources rares et précieuses qui pourraient être exploitées pour leur valeur commerciale, telles que l’hélium-3 (un isotope rare utilisé dans la fusion nucléaire ou comme carburant pour les fusées), les métaux rares (tels que le platine et le palladium) et les minéraux (tels que le thorium et le titane). Le régolithe, qui recouvre la surface lunaire, pourrait être très pratique par exemple pour réaliser des structures mais aussi pour l’impression 3D.
- L’exploration de la Lune et l’établissement de colonies pourraient aider à développer de nouvelles technologies et innovations, qui pourraient être utilisées sur Terre ou dans l’espace. Par exemple, la recherche sur la façon de créer des habitats viables sur la Lune pourrait aider à développer de nouvelles technologies de construction et de gestion de l’énergie qui seraient utiles sur Terre.
- La Lune pourrait également être utilisée comme plate-forme pour lancer des missions vers d’autres destinations dans le système solaire, comme Mars. Cela pourrait permettre de réaliser des économies importantes en utilisant la Lune comme point de départ, car il est plus facile de s’éloigner de la Lune que de la Terre en raison de sa faible gravité. Elle a donc un potentiel en tant que plateforme pour l’exploration de l’espace profond.
- Enfin, l’exploration de la Lune et l’établissement de colonies pourraient créer de nouvelles opportunités économiques, comme le tourisme spatial, la mise en place de bases de recherche et d’observation de l’espace, ou encore la création de nouvelles entreprises spécialisées dans les technologies de l’espace.
L’Union européenne, qui a développé un programme spatial ambitieux et une expertise significative dans le domaine de l’exploration spatiale et de la recherche spatiale, aimerait bien pouvoir bénéficier de quelques unes de ces retombées économiques. Malgré ses récentes déconvenues ( son nouveau lanceur léger européen Vega-C, sensé être compétitif face à l’entreprise américaine Space X, s’est perdu dans l’espace, quelques minutes après son décollage de Kourou dans la nuit du mardi 20 au mercredi 21 décembre dernier) l’UE est considérée comme l’un des principaux acteurs de l’exploration spatiale, sans avoir la même puissance de feu ou les mêmes moyens financiers que les États-Unis ou la Chine, mais en ayant pu s’imposer grâce à sa capacité à innover et à collaborer avec d’autres acteurs de l’exploration spatiale.
La France, de son coté, a signé les « accords Artémis », et fera donc partie du programme américain d’exploration lunaire. Elle devient ainsi le 20ème pays à s’associer à cette mission. Pour notre pays, « cette expédition promet de belles perspectives » comme l’explique Philippe Baptiste, président du Centre national d’études spatiales. « A la fois pour notre communauté scientifique et notre industrie, ce nouveau cadre permettra de faire face à de nouveaux défis et de continuer à compter parmi les grandes puissances spatiales. La mission Artemis pourrait générer des retombées économiques pour la France en termes de technologies développées et de nouvelles opportunités d’affaires liées à l’exploration de la Lune. «