A l’occasion du deuxième sommet sur l’agriculture et l’alimentation à Dakar, la Banque africaine de développement et divers partenaires financiers ont promis d’accroître leur soutien au secteur. Objectif : doubler la productivité de l’agriculture en misant notamment sur le progrès technique, la généralisation des engrais et l’efficience accrue des filières.
Un continent fertile, où des terres arables demeurent inexploitées, mais qui reste importateur de denrées alimentaires et où 285 millions d’habitants affrontent la malnutrition : fort de ces constats cruellement amplifiés depuis un an par la guerre en Ukraine, la Banque africaine de développement et plusieurs bailleurs de fonds ont décidé d’apporter d’importants financements supplémentaires au secteur agricole afin de développer la production. Ceci à l’occasion de l’important sommet agricole qui a réuni 34 chefs d’Etat et de gouvernements et de nombreuses personnalités politiques du 25 au 27 janvier à Dakar sous l’égide du président Macky Sall et du président de la Banque africaine de développement Akinwumi Adesina.
Le sommet dit Dakar 2 (en référence à un premier sommet fondateur tenu à Dakar en janvier 2010) avait pour thème « Nourrir l’Afrique : souveraineté alimentaire et résilience » et s’est conclu par une déclaration politique forte, résumée par la formule d’Akinwumi Adesina « il est temps pour l’Afrique de nourrir l’Afrique ». L’enjeu est de taille : les importations nettes de l’Afrique en produits alimentaires (céréales, sucre…) atteignent 100 millions de tonnes, soit environ 75 milliards de dollars par an.
En mettant en place des politiques adaptées, la valeur du secteur en Afrique, actuellement de 280 milliards de dollars, pourrait atteindre une valeur de 1 000 milliards de dollars en 2030 à l’échelle du continent, selon le président de la BAD.
A l’occasion du sommet, la Banque africaine de développement a promis des financements supplémentaires de 10 milliards sur cinq ans pour les filières agricoles. Divers autres bailleurs de fonds se sont engagés sur la même période pour 20 milliards de dollars, dont la Banque islamique de développement, à hauteur de 5 milliards de dollars.
Les Pays-Bas ont annoncé vouloir consacrer 450 millions d’euros supplémentaires, sur cinq ans, aux programmes de sécurité alimentaire axés sur l’Afrique subsaharienne. Le pays soutiendrait par ailleurs la Facilité africaine de production alimentaire d’urgence de la Banque africaine de développement à hauteur de 30 millions de dollars.
Pour sa part, le Canada va créer un nouveau fonds pour soutenir les PME du secteur agricole, doté de 73 millions de dollars US. Ce fonds sera hébergé par la BAD. L’Allemagne, entre autres, a également promis des financements supplémentaires.
Dans la déclaration finale de Dakar2, les dirigeants ont convenu de consacrer au moins 10% des dépenses publiques à l’augmentation du financement de l’agriculture pour stimuler la productivité et à parvenir à la sécurité et à l’autosuffisance alimentaire.
Du côté des politiques de moyen terme, plusieurs pistes ont été mises en avant lors du sommet.
Parmi celles-ci, figure la mise en valeur des terres arables inexploitées, dont l’Afrique recèle 65% du potentiel au plan mondial. Les zones de savane, à elles seules, sont estimées à 400 millions d’hectares, dont seulement 10% (40 millions d’hectares) sont cultivées, estime la BAD.
Selon la banque, il s’agit aussi « d’investir dans l’augmentation de la productivité agricole, soutenir les infrastructures, les systèmes agricoles intelligents face au climat, avec des investissements du secteur privé tout au long de la chaîne de valeur alimentaire ».
Ceci par notamment la généralisation de l’utilisation des semences améliorées, le développement des engrais, de la mécanisation ou du stockage comme le fait la BAD avec divers partenaires et Etats à travers le programme Technologies for African Agricultural Transformation auquel la banque a consacré 800 millions de dollars dans 21 pays depuis 2018 en touchant déjà 20 millions d’agriculteurs avec un objectif de 40 millions.
Le sommet a mis en avant également certains progrès techniques portant par exemple sur l’introduction dans certains pays (Ethiopie, Soudan…) de variétés de blé tolérantes à la chaleur et à haut rendement ou dans d’autres de variétés de maïs, OGM ou non, résistantes au stress hydrique (programme Water Efficient Maize for Africa ou WEMA).
Depuis plusieurs années, la BAD cofinance également avec certains Etats, la création de plate-formes intégrées (production, transformation et logistique). Cette politique dite Special Agricultural processing zones (SAPZ) est mise en œuvre dans 24 projets à ce jour dans différents pays dont la Côte d’Ivoire, Madagascar, le Sénégal, le Togo, la RD Congo ou le Nigeria. Une politique dotée d’un budget de 840 millions de dollars que la banque présidée par Akinwumi Adesina compte amplifier encore.