L’Agence française de développement (AFD) a publié le mois dernier un ouvrage sur «l’économie africaine 2022». Ce rapport met en lumière les grandes tendances macroéconomiques de l’Afrique post-covid. Après une longue période d’arrêt et une récession de -1,3 % en 2020 dû à la pandémie, l’Afrique a renoué avec la croissance en 2021, et le produit intérieur brut du continent a dépassé son rythme de progression d’avant-crise. Il est donc passé de 3,2 % en 2019 à 3,6 %.
Cette reprise assez robuste est influencée par les entrées des capitaux, le retour des fonds de la diaspora, mais aussi l’augmentation de la demande énergétique et la hausse des cours du pétrole (+59 %) et des métaux de base (+50 %). Une trentaine de pays africains a notamment pu bénéficier de la poursuite de l’appui des bailleurs de fonds, redonnant de l’espace fiscal à certains pays. Ces territoires africains ont ensuite pu faire 1,8 milliard de dollars d’économie. L’économie africaine reste tout de même lente et de sérieux écarts de reprise existent à l’échelle mondial. « La croissance mondiale a atteint en 2021 près du double de la croissance africaine ». La croissance mondiale se situe entre 5 % et 7,5 %, alors qu’en Afrique, elle est comprise entre 2,5 % et 3 %.
La croissance prévue de 3,8% par le Fonds monétaire international (FMI) en 2022 sera insuffisante pour résorber l’intégralité des chocs générés par la Covid-19. Ce bilan oblige le FMI à revoir à la baisse les perspectives de croissance pour 2022 car « les économies avancées ont consacré en moyenne près de 7,2 % de leur PIB respectif à la relance post Covid-19 mais les Etats africains n’ont pu soutenir leurs économies qu’à hauteur de 2,6% du PIB .»
Selon ce rapport de l’Agence française de développement, à cela s’ajoute l’augmentation du nombre de personnes devenues précaires à cause de la pandémie. Les chiffres s’élèvent aujourd’hui à plus de 33 millions en Afrique. « Depuis environ dix ans, presque tous les pays africains affichent des signes de progrès économique avec des taux de croissance entre 5 % et 9 %, mais sans grand effet sur la réduction de la pauvreté qui (…) touche majoritairement les jeunes et les femmes. ». Ces millions de personnes précaires sont dispersés de manière hétérogène car des disparités existent sur le continent. En Afrique du Sud ou au Maghreb, le niveau de vie est en moyenne trois fois plus élevé qu’en Afrique de l’ouest.
Les disparités dépendent principalement de la spécialisation des économies de chaque pays. L’Afrique centrale et australe est très dépendante des matières premières extractives. En Afrique de l’est ou du nord, les économies sont moins dépendantes des ressources naturelles. Cinq des dix pays (l’Afrique du Sud, l’Angola, le Nigeria, le Ghana et l’Algérie) représentant 40 % de l’économie du continent tirent près de 80 % de leurs richesses à partir de leurs exportations liées aux matières premières extractives. Les pays dépendant du tourisme, comme la Tanzanie ou l’île Maurice dépendent, eux, extrêmement des variations des cours des matières premières et des mesures sanitaires liées au Covid. Les pays dont les économies sont les plus diversifiées sont donc ceux qui ont le mieux résisté à cette crise.
Une grande partie des économies des pays d’Afrique est dominée par l’agriculture, avec une population essentiellement rurale. Pour améliorer la situation économique de l’Afrique, « il est indispensable de s’assurer que les politiques travaillent à un développement équilibré des territoires afin que les personnes qui vivent dans les lieux les plus reculés puissent également être concernées par les politiques. » La Banque mondiale estime de son côté que l’accord commercial de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) pourrait également accroître le revenu régional de 7 %, sortir 30 millions de personnes de la pauvreté d’ici 2035 et entraîner une hausse des salaires à hauteur de 10 %, ainsi qu’une augmentation des exportations intracontinentales de 81 %.
« L’économie africaine 2022 » examine donc les trajectoires de développement africaines, en plaçant au cœur de l’analyse la structure des économies, leurs évolutions potentielles, mais aussi et surtout la prise en compte des populations les plus vulnérables. L’ouvrage est sorti en librairie (collection « Repères », Éditions La Découverte).