Un ciel sombre, mais qui promet de s’éclaircir, si l’on attend un peu… telle se présente, la météo du commerce mondial, selon les prévisions de l’OMC dévoilées il y a quelques jours.
En attendant, cette publication vient confirmer le fort ralentissement actuel des échanges. Après 2,7% de croissance en 2022, le commerce de biens en volume ne devrait progresser que de 0,8% en 2023, estime l’institution basée à Genève. Les services de l’économiste en chef Ralph Ossa (photo) ont sévèrement baissé leur prévision antérieure chiffrée en avril à 1,7%.
Plusieurs facteurs expliquent cet état de fait, dont le ralentissement du secteur manufacturier et le manque de dynamisme général du PIB mondial (+2,6 % en 2023 et +2,5 % en 2024, selon l’OMC.
« Le commerce et la production (…) ont brusquement ralenti au quatrième trimestre 2022, les effets de l’inflation persistante et du resserrement de la politique monétaire se faisant sentir aux États-Unis, dans l’Union européenne et ailleurs, et les tensions sur les marchés immobiliers en Chine empêchant une reprise plus forte après la COVID-19 de prendre racine », détaille ainsi l’organisation dirigée par Ngozi Okonjo-Iweala.
L’OMC (dont les prévisions ont été publiées quelques jours avant l’attaque terroriste d’Israël par le Hamas) pointe aussi les effets de la guerre en Ukraine et note par ailleurs que le ralentissement actuel du commerce « semble être généralisé et concerne un grand nombre de pays et un large éventail de produits ».
Les chiffres de l’OMC montrent que le commerce mondial est, en fait, entré en territoire négatif au premier semestre 2023, avec un recul estimé à 0,5% sur cette période qui explique la forte correction de prévision. Ce ralentissement a touché notamment des catégories de biens manufacturés comme le fer et l’acier, les équipements informatiques et de télécommunications ou encore le textile et l’habillement. A l’inverse, les secteurs « automobile » et « aéronautique » continuent de progresser.
Dans ce contexte, la relance globale des échanges serait déjà à l’œuvre ce second semestre et se poursuivra donc l’an prochain. Selon l’OMC, la reprise « sera probablement tirée par l’augmentation des échanges de biens étroitement liés au cycle économique, comme les machines et les biens de consommation durables, qui ont tendance à se redresser lorsque la croissance économique se stabilise ».
Au-delà de la situation conjoncturelle, l’OMC s’alarme d’une évolution plus structurelle en matière de tensions géopolitiques (Etats-Unis – Chine au premier chef) ayant un effet dépressif sur le commerce. « Des signes commencent à apparaître selon lesquels la fragmentation des chaînes d’approvisionnement pourrait menacer les perspectives relativement positives pour 2024 », s’inquiète ainsi l’OMC. Selon l’organisation de Genève, la part des biens intermédiaires dans le commerce (…), indicateur de l’activité des chaînes mondiales d’approvisionnement, est tombée à 48,5 % au premier semestre 2023, contre une moyenne de 51,0 % ces trois dernières années. « En outre, la part des partenaires bilatéraux asiatiques dans le commerce américain de pièces et accessoires – un sous-ensemble clé d’intrants intermédiaires – est tombée à 38 % au premier semestre 2023, contre 43 % au cours de la même période de 2022 », relève l’OMC.
A noter que les prévisions de l’Organisation mondiale du commerce sont en ligne avec celles du FMI publiées quelques jours plus tard à l’occasion de son assemblée annuelle qui s’est tenue avec celle de la Banque mondiale à Marrakech du 9 au 15 octobre dernier.
Le FMI qui a légèrement dégradé ses chiffres, table sur une croissance mondiale de 2,9% en 2024, contre 3% cette année. Concernant le commerce mondial, la croissance (biens et services) devrait atteindre 3,5% en 2024 contre 0,9% pour l’année en cours, toujours selon les économistes du FMI. Les exportations de biens des pays émergents, segment le plus affecté par le ralentissement actuel (-1,4%) rebondiraient nettement à +3,8% en 2024, de même source. Quant à celles des pays développés, elles devraient progresser de 2,8% en 2024 contre 1,1% cette année. Si modeste soit-elle, la reprise est bien en vue…