Lutter contre la fraude, notamment contre les produits importés… Tel est l’objectif affiché de la nouvelle législation fédérale sur les produits alimentaires issus de l’agriculture bio aux Etats-Unis mise en œuvre par l’USDA (U.S. Agriculture Department). Ce dispositif dénommé Strengthening Organic Enforcement (SOE) couvre les producteurs, importateurs, négociants et commerçants. Il est applicable à compter du 20 mars 2023 avec une période de transition d’un an jusqu’au 19 mars 2024.
Le texte est disponible en ligne et l’administration américaine a, également, publié un synoptique comparant la nouvelle réglementation avec sa version antérieure.
Selon les professionnels, cette réforme est la plus importante du genre depuis la mise en place d’un cadre légal pour le bio en 1990 avec le « Organic Foods Production Act », Parmi les nouveautés, tous les opérateurs du secteur devront collecter et pouvoir démontrer les certifications de l’ensemble des acteurs de la chaîne en amont. Cette disposition s’applique également, ce qui est nouveau, aux entreprises ne réalisant que des opérations de commerce (trading).
L’étiquetage des emballages « non commerciaux », c’est-à-dire utilisés lors des opérations logistiques, est également requis.
Les entreprises devront aussi fournir des données plus complètes et plus fréquentes sur leur processus de certification et ceux de leurs fournisseurs. L’administration de l’Agriculture a, par ailleurs, obligation de réaliser des contrôles sur au moins 5% des entreprises certifiées. Le niveau de formation du personnel technique chargé des certifications doit être aussi accru.
Le texte réaffirme l’exigence pour tous les produits importés d’une certification selon le référentiel dit « National Organic Program », ou NOP de l’USDA. Ce label général est l’équivalent du label AB en France. En pratique, l’entrée de tout produit bio aux Etats-Unis nécessite déjà un « NOP Import Certificate ». Mais de par la loi désormais, celui-ci doit être compatible avec le système de douane électronique.
Comme par le passé, les produits étrangers entrants aux Etats-Unis devront être certifiés dans leur pays par un organisme formellement reconnu par l’USDA, mais avec des règles durcies.
Dans la pratique, un cadre de reconnaissance mutuelle des systèmes de certification existe avec certains partenaires commerciaux, dont l’Union européenne. Les Etats-Unis et l’Europe ont ainsi mis en place, depuis 2012, un système de reconnaissance réciproque (U.S. – EU Organic Equivalency Arrangement) qui n’est pas remis en cause par le nouveau texte. Ce système d’équivalence existe aussi, par exemple, avec le Japon, le Canada ou le Royaume-Uni (post Brexit). Mais cette reconnaissance n’est pas générale, elle n’existe pas avec le Mexique, par exemple, et est très peu développée pour d’autres pays, notamment africains ou asiatiques, dont les produits sont susceptibles d’être commercialisés par des entreprises européennes.
Le marché du bio s’est fortement développé, ces dernières années, aux États-Unis. Il est estimé à 63 milliards de dollars pour l’année 2021 par l’association professionnelle Organic Trade Association. Et selon l’USDA, en 2021, il y avait 17 445 exploitations agricoles certifiées bio.
Si les évolutions varient selon les catégories de produits, la tendance en 2022 a, toutefois, été marquée par une stagnation du marché américain, voire un repli, comme en France.
L’attrait de ce secteur, ces dernières années, a, néanmoins, causé plusieurs cas de fraudes spectaculaires cités par l’administration américaine. Un négociant du Dakota du Sud a ainsi été condamné, en 2021, au plan fédéral à 51 mois de prison et 15 millions de dollars d’amende pour avoir faussement labellisé bio des céréales et oléagineux pour une valeur estimée à 71 millions de dollars. L’USDA rapporte aussi le cas, en 2017, de trois cargos chargés dans la Mer Noire transportant plus de 50 0000 tonnes de maïs et soja faussement qualifiés de bio à leur arrivée aux Etats-Unis.