Plus de 80% des marchandises mondiales transitent via le fret maritime selon l’UNCTAD, mais depuis la fin de l’année 2022, le transport maritime, pilier du commerce international, est pris en otage par une série d’événements qui font exploser les prix et perturbent gravement les chaînes d’approvisionnement mondiales.
Depuis décembre dernier de nombreuses attaques ont lieu en mer Rouge de la part des rebelles Houthis au Yémen (en affirmation de leur solidarité avec les Palestiniens de Gaza) qui contraignent les navires à contourner l’Afrique par le cap de Bonne Espérance, rallongeant ainsi les trajets de 10 à 20 jours entre l’Asie et l’Europe. La situation touche particulièrement les porte-conteneurs, 67% moins nombreux à emprunter cet axe qu’un an plus tôt. Cette déviation forcée, loin d’être anodine, impacte lourdement les délais de livraison et engendre des coûts supplémentaires considérables. Aux surcoûts logistiques, il faut ajouter l’augmentation des primes d’assurances et l’entrée en vigueur de la taxe carbone dans l’espace européen.
C’est ainsi que, depuis fin 2023, les tarifs du fret maritime en provenance notamment de Chine, connaissent des hausses vertigineuses. Les tarifs pratiqués par les grandes compagnies maritimes ont doublé et sont même parfois multipliés par trois. La saturation des navires et la demande accrue font grimper les prix de manière exponentielle, rappelant les perturbations majeures de l’ère Covid. Le prix d’un conteneur de 40 pieds entre l’Asie et la Méditerranée a ainsi grimpé de 3 000 à 6 000 dollars chez CMA CGM, et de 2 900 à 5 900 dollars chez MSC en fin d’année dernière. L’indice SCFI (Shanghai Containerized Freight Index), qui suit les prix au comptant des conteneurs vers une vingtaine de destinations dans le monde, a augmenté de 36,2 % en janvier dernier. Cette flambée des prix du transport maritime se répercute inévitablement sur l’ensemble de la chaîne logistique avec des effets néfastes sur les consommateurs finaux. Nous sommes certes loin de la situation liée à la crise du Covid quand les coûts du fret maritime avaient été multipliés par dix, mais la grande inconnue reste la durée de la crise. L’OCDE affirme d’ailleurs que « la récente augmentation de 100 % des coûts de transport maritime, si elle était persistante, pourrait ajouter à la hausse annuelle des prix à l’importation dans la zone OCDE près de 5 points de pourcentage, ce qui se traduirait par un surcroît d’inflation mesurée par les prix à la consommation de 0,4 point de pourcentage au bout d’un an environ ». Le regard fixé sur ces différents indicateurs, les donneurs d’ordres européens se tournent à nouveau vers l’aérien. Dès la deuxième semaine de janvier, le tonnage mondial de fret aérien a bondi de 24% par rapport à la semaine précédente.