Sur fonds de sanctions internationales frappant la Russie, les deux pays veulent se lancer dans la conclusion d’un accord de libre-échange approfondi.
Défiance face au G7 ou intérêts bien sentis… A moins que ce ne soit les deux… L’Inde veut renforcer ses liens commerciaux et industriels avec la Russie. En dépit des sanctions européennes, américaines, et dans une certaine mesure japonaises, qui frappent Moscou, le pays conduit par Narendra Modi a fait part de sa volonté de négocier un nouvel accord de libre-échange avec la Russie.
C’est ce qu’a indiqué le ministre indien des Affaires étrangères S. Jaishankar, ce 17 avril à l’occasion d’une rencontre avec le vice-Premier ministre russe et ministre du Commerce et de l’Industrie, Denis Manturov dans le cadre d’une manifestation sur « Dialogue commercial Inde-Russie » à New Delhi. Les discussions portent également sur un nouveau traité bilatéral de protection mutuelle des investissements, selon le ministre indien.
Ces déclarations s’inscrivent sur fonds de forte progression des échanges entre ces pays, tous deux membres des BRICS. Le commerce bilatéral a été multiplié par plus de trois et atteint le niveau record de 39,8 milliards de dollars sur l’exercice fiscal indien 2022–23 (mars à mars), selon les autorités indiennes. Un fait qui s’explique pour l’essentiel par le boom des exportations vers l’Inde de pétrole russe, frappé pour l’essentiel d’embargo par les pays du G7, suite à l’agression de l’Ukraine en février 2022.
Depuis l’ère du président Nerhu, la Russie (l’URSS alors) compte parmi les partenaires traditionnels de l’Inde, notamment dans le domaine de la défense. Les deux pays sont déjà liés aujourd’hui par un traité bilatéral d’investissement assez basique. Pour aller plus loin, ils ont, lors de la rencontre de New Delhi, indiqué vouloir créer une commission intergouvernementale sur le commerce et les technologies.
Dans le détail, les discussions envisagées portent notamment sur les certificats d’origine et autres documents commerciaux mutuellement acceptables, ou encore la reconnaissance mutuelle des normes. Au menu figure aussi notamment, l’utilisation mutuelle des devises nationales lors de la conclusion d’accords commerciaux, dans le cadre de la réduction de place du dollar et l’euro. De manière plus immédiate, la Russie assure vouloir rendre éligible aux produits indiens son programme de prêts préférentiels et d’assurance pour les importateurs russes.
Pour rappel, l’Inde négocie par ailleurs avec la Russie et les autres pays membres, un accord de libre-échange dans le cadre de l’Union économique eurasienne (EAEU) qui regroupe la Russie l’Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan et le Kirghizistan. Dans les faits, plus que la Russie, le pays de Narendra Modi, qui veut se poser en alternative à la Chine en matière d’investissement étranger et d’industrie manufacturière, cherche actuellement surtout à attirer les grandes entreprises occidentales comme il l’a fait avec succès avec Apple (et son partenaire taïwanais Foxconn), ceci dans un contexte de déséquilibre structurel de ses échanges.
L’Inde vient ainsi d’enregistrer un déficit commercial global de 266,78 milliards de dollars sur l’année fiscale 2022-2023 contre 191,05 milliards de dollars sur la période précédente.