La digitalisation de la douane n’est pas un phénomène nouveau. On peut donner un point de départ en 2008 avec depuis un enchainement constant de digitalisation de certaines procédures.
Le CDU (Code des Douanes de l’Union) et ses dispositions d’application ont remplacé l’ancien CDC (Code des douanes Communautaire). Avec le CDU et son annexe B, on passe dans une nouvelle dimension avec la digitalisation comme un véritable effet de levier de l’intégration européenne. De l’affaire, il prévoit que tous les échanges soient désormais réalisés de façon électronique.
La première raison est la sécurisation de cette union douanière. La douane a besoin d’analyser les risques des marchandises avant leur entrée sur le territoire européen, tant que les contrôles n’ont pas été opérés : ce programme de sécurité et de sureté d’analyse des risques des marchandises, ICS2, est un des projets emblématiques dans le CDU.
La 2ème raison est l’harmonisation que l’on retrouvera à deux niveaux. On objecte souvent que selon l’État membre dans lequel on effectue des formalités douanières, il y a une interprétation différente. Avec la digitalisation, on a un développement des pratiques communes entre les États.
Le 2ème niveau tient au fait que la digitalisation de la douane s’est opérée par empilements successifs. C’est-à-dire qu’on a d’abord travaillé sur le transit, puis sur le dédouanement, ICS est arrivé après ECS et finalement on a construit des systèmes hétérogènes.
Aujourd’hui dans l’annexe B du CDU sont listés tous les types de déclarations et toutes les données que ces déclarations peuvent comporter.
Le bénéfice va être multiple. Le 1er est de pourvoir chaîner les processus entre eux. Quand il y a une déclaration de transit et une déclaration de dédouanement, ce n’est pas la même chose, harmoniser et digitaliser le processus permet de réutiliser les données sans avoir à les ressaisir.
Le 3ème objectif de la réforme est la simplification. Certains dispositifs prévus par le CDU n’étaient aujourd’hui pas proposés car nos systèmes informatiques n’étaient pas capables de les gérer. Dorénavant, tout ce qui sera écrit dans le code, se retrouve dans les Deltas et dans les autres applications.
Pour les entreprises comme pour la douane, cela permet également plus de contrôle. Avec de la donnée plus structurée, cela permet de faire des contrôles internes de façon automatisée plutôt que manuellement en reprenant un lot d’opérations.
L’échéance fixée par le CDU est au 31 décembre 2025. Nous avons donc moins de 3 ans pour mettre en conformités tous les services informatiques de tous les états membres, qu’ils soient tous interconnectés, et en même temps absorber la charge du e-commerce, du Brexit, du COVID qui ont quelque peu perturbé les plannings de travail de la Commission et des États membres. Pour dire la vérité, nous ne sommes pas spécialement en avance.
Quel calendrier pour la réforme ?
Le premier concerné sera le fret aérien. Pour les opérations d’avant dédouanement sur le secteur aérien, le nouveau système de sûreté et de sécurité ICS 2 doit être déployé avant le 30 juin. Cela ne concernera que le fret aérien car la douane a considéré qu’il était pertinent d’associer ce nouveau dispositif sûreté sécurité au dépôt d’une déclaration sommaire d’entrée dans l’Union Européenne. On a déjà un système de suivi à travers les Cargo Community System, mais l’idée est de chaîner les systèmes grâce aux déclarations ICS 2.
C’est typiquement l’objet de la réforme. Mais le transport aérien ne concerne qu’un flux limité et un nombre de plateforme restreint.
Le vrai enjeu se porte sur le fret maritime, pour lequel seront déployés des outils à l’export en 2024.
À l’import, le vrai changement va être le remplacement des outils Delta G et Delta par le nouveau module Delta IE volet importation. L’objectif est de déployer cet outil, et de le mettre en service au 15 septembre prochain.
Une phase d’expérimentation précédera cette mise en service dès le 15 juillet prochain avec une dizaine d’opérateurs et quelques bureaux de douane. Ce qui permettra d’enlever les bugs qui pourraient subsister, ou plutôt de bien comprendre les difficultés s’il y en a.
Ce nouveau Delta IE à l’import fonctionnera avec des messages constitués de jeux de données qui viendront remplacer le document administratif unique existant.
Dans la mesure où tous les opérateurs n’auront pas forcément un même état d’avancement, la Douane a mis en place une phase de transition, ou plutôt de migration qui durera 3 mois et qui permettra aux opérateurs qui ne seraient pas prêts au 15 septembre de se préparer.
Cette phase s’achèvera vers le 15 décembre prochain, de sorte qu’à la fin de l’année 2023 les applicatifs existants, c’est-à-dire les anciens Deltas, cesseront de fonctionner pour les nouvelles déclarations. C’est-à-dire qu’on ne pourra plus déposer de déclaration en douane pour l’importation dans Delta X et Delta G, toutes les formalités déclaratives devront passer par le nouveau Delta Import. Même si une coexistence pour les déclarations déposées avant est possible pour permettre le suivi.
Marc Hoffmeister