Le rapport de la Cour des comptes européenne, publié il y a quelques jours, est formel : Le transport routier représente encore les 3/4 du transport de marchandises en Europe.
L’UE a fixé un objectif de réduction de 90 % des émissions de CO2 pour les poids lourds d’ici à 2040, un projet ambitieux, mais obsolète, voir contre-productif face à un réseau européen d’infrastructures qui n’est toujours pas adapté au transport intermodal, l’une des seules alternatives écologiques. L’intermodalité, qui consiste à combiner plusieurs modes de transport, constitue un élément clé de la décarbonation voulue par l’Union européenne. Malheureusement le transport de marchandises dans l’UE n’est pas sur les bons rails…
Selon ce rapport le transport routier domine largement les échanges intra-européens. La part du fret routier représente ainsi environ 77% du fret européen et reste l’un des plus grands émetteurs de CO2. Certes ce mode de transport est moins cher, plus rapide et plus flexible, mais il est aussi moins sûr et plus polluant. Le transport de marchandises, afin de poursuivre son objectif de devenir plus « vert », pourrait passer par moins de transport routier et privilégier davantage le rail ou la navigation intérieure, mais en pratique, c’est même le contraire : Entre 2010 et 2020, la part du rail et de la navigation a même diminué, passant de 25 à 23% du total du fret intérieur.
Dans ce rapport est montré que certaines règles européennes nuisent à l’attractivité du transport intermodal. La version actuelle de la directive sur les transports combinés est dépassée (elle date de 1992) et inefficace. La Commission européenne a tenté à plusieurs reprises de réviser cette directive, sans pouvoir obtenir l’accord des États membres. Les problèmes liés à la gestion des capacités et à l’interopérabilité risquent ainsi de perdurer si aucune nouvelle mesure législative n’est prise. Les États membres ont pris du retard dans la mise en conformité des infrastructures avec les exigences techniques fixées dans le droit de l’UE. Ainsi, pour concurrencer le transport routier, l’une des améliorations les plus rentables consisterait à exploiter des trains plus longs, c’est-à-dire ayant la dimension européenne standard de 740 mètres. Or, à l’heure actuelle, ces trains ne sont théoriquement exploitables que sur seulement la moitié des rails du réseau central transeuropéen.
Cependant, même si il reste à l’Europe encore beaucoup de chemin à parcourir avant d’atteindre son objectif de décarbonation, de nouveaux projets sont tout de même mis en place. Le mois dernier par exemple, face à l’urgence climatique, trois grands groupes français se sont réunis afin de créer une nouvelle alliance dédiée à la transition énergétique du transport routier de marchandises en Europe. Le consortium nommé « l’ECTN Alliance » (pour European Clean Transport Network Alliance) est composée de Ceva Logistics, du fournisseur d’énergie Engie, et du groupe Sanef a pour objectif de construire un réseau de terminaux pour les poids lourds. Ce projet sera dédié au transport de marchandises sur les autoroutes européennes, et s’appuiera sur des solutions d’approvisionnement en énergies bas-carbone.