Nouvelle baisse de l’activité cargo dans le ciel mondial. Selon les données de l’Association du transport aérien international (IATA) la demande, mesurée en tonnes-kilomètres de fret (CTK), continue de chuter.
La demande mondiale, mesurée en tonnes-kilomètres de fret (CTK), a baissé de 3,4 % en juin dernier par rapport à juin 2022 (-3,7 % pour les opérations internationales). Elle avait aussi diminué en avril 2023 de 6,6% par rapport à avril 2022. Au total, sur le premier semestre de l’année, elle a reculé de 8,1% par rapport à la période janvier-juin 2022 (-8,7% pour les opérations internationales). Cependant, la demande en juin n’était que de 2,4 % inférieure aux niveaux pré-pandémiques de juin 2019.
Selon l’IATA, les principaux facteurs influençant la demande de fret aérien comprennent une baisse de la production et des exportations manufacturières mondiales et une diminution du commerce transfrontalier mondial. L’écart entre les taux de croissance annuels du fret aérien et du commerce mondial de marchandises s’est cependant rétréci mais il suggère toujours que le fret aérien continue de souffrir plus que le fret conteneurisé du ralentissement du commerce mondial. « Nous gardons espoir que les conditions commerciales difficiles pour le fret aérien s’atténueront à mesure que l’inflation s’atténuera dans les principales économies. Ceci, à son tour, pourrait encourager les banques centrales à relâcher la masse monétaire, ce qui pourrait stimuler une plus grande activité économique », a déclaré Willie Walsh, directeur général de l’IATA.
Ce mois-ci un nouveau petit nuage est d’ailleurs apparu dans le ciel du transport aérien : Le service postal américain a annoncé avoir réduit son volume d’expéditions par avion de 90% sur deux ans, mettant le service sur la bonne voie pour économiser 1 milliard de dollars en coûts de transport annuels.
Quoiqu’il en soit, même si ce recul de l’activité du fret aérien a tendance à diminuer et si la difficulté d’interpréter ces chiffres, parfois contradictoires, elle, augmente, cela n’empêche pas les opérateurs de se préparer pour l’avenir. Le secteur est actuellement en pleine mutation et doit trouver sur lesquels de ses leviers internes il doit pouvoir agir afin de conserver ses parts de marché.
L’une des tendances est par exemple celle d’agir pour lutter contre la pénurie généralisée de ses travailleurs qualifiés. « Les véhicules autonomes et les robots auront un impact majeur sur l’avenir du fret aérien en période de pénurie de main-d’œuvre », assure l’aéroport de Munich qui teste actuellement l’evoBOT dans sa zone fret. Armé de deux roues et de bras de préhension, ce robot peut atteindre une vitesse maximale de 60 km/h et transporter une charge allant jusqu’à 100 kg. Au quotidien, il peut réaliser des tâches comme la manutention de marchandises dangereuses, le transport de colis sur des trajets récurrents ou l’assistance lors du chargement et du déchargement des avions.
L’autre tendance du secteur est la décarbonation. Aujourd’hui, de nombreux acteurs dans la construction aéronautique cherchent des moyens pour décarboner le secteur du transport aérien. La collaboration par exemple entre Natilus, un développeur d’avions-cargos à ailes mixtes (BWB), et ZeroAvia, un expert de l’aviation zéro émission, s’inscrit notamment dans cet objectif de réduire l’empreinte carbone de cette industrie. Ces deux entreprises travaillent conjointement afin de développer une solution de livraison de fret aérien sans émission de CO₂ grâce à un aéronef autonome à propulsion hydrogène-électrique nommé « Kona ». Cet avion-cargo sans pilote sera équipé d’une aile hybride et sera propulsé par un moteur électrique à hydrogène. Cette configuration lui conférera une autonomie supérieure, ce qui permettra d’accroître sa portée opérationnelle.
Ici aussi la contradiction n’est pas mince : alors que le secteur se place sous le signe de la décarbonation, les commandes d’avions se multiplient. Face à l’afflux de ces commandes, Airbus et Boeing doivent augmenter les cadences de production sans casser la chaîne de sous-traitants pour servir au plus vite les compagnies clientes. Après Airbus, Boeing a profité du salon du Bourget pour dévoiler ses dernières prévisions, qui évoquent également un doublement de la flotte. Le fabricant estime que l’aviation commerciale aura besoin de 42.595 nouveaux appareils au cours des vingt prochaines années.
Pour des quantités moindres, parmi les développements les plus visibles, une utilisation des engins volants au service du fret ne passe pas inaperçue avec des taxis aériens de plus en plus performants. Cette activité est rassemblée sous l’appellation mobilité aérienne urbaine (ou UAM). Parmi les acteurs du marché, Volocopter propose aujourd’hui un drone cargo de transport lourd baptisé VoloDrone, entièrement électrique, capable de transporter des charges de 200 kilos sur 40 kilomètres.
Les années de pandémie ont généré des revenus records grâce au fret aérien. Avec une offre limitée en raison de l’immobilisation des avions de transport de passagers et une demande en hausse grâce à l’essor du commerce électronique, les prix par kilogramme de fret ont grimpé en flèche ces dernières années. Aujourd’hui les opérateurs doivent trouver des solutions afin d’éviter le glissement, déjà commencé, des prix du fret et cela, quels que soient les volumes de livraison.