Dans l’actualisation de sa dernière étude (une vision à 360 degrés des échanges extérieurs de la France) la Fabrique de l’Exportation a analysé de façon sérieuse et méthodique les causes et la réalité de la non-performance des entreprises françaises à l’export qui entrainent un déficit de 100 milliards dans notre balance du commerce extérieur.
Menée en comparaison avec quatre pays (Allemagne, Espagne, Italie, Grande Bretagne) l’étude constate bien entendu que la part du marché mondial de la France dans les biens manufacturés a été divisée par deux sur les vingt-cinq dernières années baissant ainsi de 6 à 3%. Cette perte est particulièrement observable sur le marché européen où la part de la France est passée de 9 à 5%.
Les services : fer de lance de nos exportations
Les ventes de services, elles, ont été multipliés par trois à tel point que la valeur des exportations de services a atteint la moitié de celle des biens. En comparaison avec les autres pays de référence de l’Union européenne, la France a un développement plus important du commerce de services, à l’exception du Royaume-Uni. Ceci est d’autant plus remarquable que la Valeur Ajouté des ventes de service est plus élevée que celle des biens manufacturés. A noter que contrairement aux idées reçues, le tourisme ne représente que 20 % des ventes de services en France.
Enfin 85% de nos ventes à l’export sont réalisées par des grandes entreprises ou des grosses ETI, ce qui est assez comparable à l’Allemagne mais très différent de l’Italie et de l’Espagne ou la part des PME est beaucoup plus importante.
L’implantation de filiales : le modèle français
Dans les dix dernières années ont a constaté un important développement des filiales d’entreprises françaises à l’export avec une hausse spectaculaire entre 2010 et 2019 de 50% du nombre et de 42% du CA. On compte aujourd’hui presque 50 000 filiales françaises à l’étranger qui emploient 7 millions de personnes. C’est la croissance la plus importante d’Europe. Sur le critère du CA réalisé par salariés à l’étranger, seule l’Allemagne devance la France, ceci étant lié à l’importance de ses implantations dans la distribution/réparations qui tendent à générer beaucoup de chiffres d’affaires par employé.
L’étude démontre ainsi que si on prend en compte les ventes des filiales étrangères des entreprises françaises (soit plus de 1700 Mrds d’€ de chiffre d’affaires en 2019) cela en fait un pilier essentiel de l’économie française, aux côtés de l’exportation (759 Mrds d’€ de chiffre d’affaires) et cela bat en brèche l’analyse du Made in France par rapport au Made by France. Dans le secteur manufacturier, la part de marché du Made by France était de 4,2%, tandis que celle du Made in France était de 3,5%. Dans les services aux entreprises, la part de marché élargie de la France a atteint près de 5,8% du marché mondial, comparée à environ 4,2% pour sa part à l’exportation.
La France est-elle moins compétitive à l’export ?
Une analyse approfondie a été menée par l’étude sur la compétitivité par rapport aux six pays choisis pour comparaison. La France semble avoir perdu de 15 à 20% de compétitivité par rapport aux autres pays de référence sur la période 2000-2020. On observe toutefois une inflexion en 2013, et le niveau de compétitivité se maintient de 2014 à 2019. En revanche, dans le secteur des services, la France a fortement gagné en compétitivité par rapport à ses partenaires entre 2004 et 2019, l’indice de compétitivité étant multiplié par près de 3,5 sur la période.
Small is beautiful
Si on met à part le coté ré-industrialisation de la France qui est le fer de lance du gouvernement et qui est en route, la plus importante recommandation de l’étude est de flécher les appuis et aides sur les Pme-Pmi qui sont structurellement faibles à l’export en France. Le faire tout particulièrement dans le secteur des services est pour les auteurs une évidence. La compétitivité des services en France est importante et elles sont moins sujet aux aléas internationaux. L’agilité est aussi la marque de fabrique des Pme qui, dans un monde qui se complexifie, peuvent réagir plus vite et s’adapter.
De son coté le Président de la Fabrique de l’Exportation Etienne Vauchez plaide pour revaloriser l’image de l’exportation en France. « Pour qu’une activité fonctionne bien, il faut attirer les meilleurs talents, et pour cela, il faut que les gens aient envie de rejoindre quelque chose qui gagne, quelque chose qui marche, quelque chose où on gagne de l’argent. Il faut commencer à construire un discours qui valorise le génie des entreprises françaises à l’international. »
Si on reste sur notre faim sur les recommandations de l’étude qui n’a pas trouvé de solution miracle, on retiendra que notre salut ne viendra pas que de l’industrie mais que les services sont sans doute le meilleur de nos atouts à court terme. La spécialisation de nos entreprises et le « chassé en meute » de nos amis italiens seraient surement de bonnes solutions, mais force est de constater que ce n’est pas culturel. La force de notre pays étant les grands groupes à l’étranger, c’est peut-être de ce côté qu’il faut encore chercher car ils pourraient servir de porte-avions pour nos PME.