Alors que le commerce mondial s’effondre en raison de la faiblesse de la demande des consommateurs, des retombées persistantes du Covid et des tensions protectionnistes, que la Banque mondiale estime que l’économie mondiale est dans un « état précaire », la Chine, à son tour, traverse une période de troubles.
Le pays a publié il y a quelques semaines des chiffres commerciaux médiocres. Les exportations chinoises ont notamment chuté pour la première fois en trois mois (- 7,5 % sur un an à 283,5 milliards de dollars).
Dans le détail, les exportations vers les États-Unis ont chuté de 18,2 % à 42,5 milliards de dollars, et de 6,9% vers l’Union européenne à 44,6 milliards USD. Les ventes de biens de consommation chinois, privilégiés par les Européens et les Américains, continuent de chuter. Les exportations de produits chinois de haute technologie font -13,5%, ceux de téléphones mobiles -25 %. Les exportations de chaussures ont diminué de 9,3 % et celles de produits agricoles ont chuté de 7 %, à 8,1 milliards USD. Certes, il y a eu quelques points positifs pour les exportations chinoises. Les expéditions vers l’Afrique par exemple ont augmenté de 13,7 %, les exportations de voitures ont augmenté de 123,5% (9 milliards USD), celles de produits pétroliers font +16 % et celles de sacs à main et de bagages +2,4 %.
Coté importations Pékin encaisse des chiffres également difficiles. Depuis 2020, la Chine a dépassé les États-Unis et l’Europe en tant que plus grand importateur de produits alimentaires et agricoles. Selon Trade Data Monitor, au premier trimestre 2023, le pays a importé 52,4 milliards de dollars de cette tranche, en hausse de 14,6 % par rapport au premier trimestre 2022.
La Chine reste le principal partenaire commercial de la Russie. Les importations en provenance de Russie ont augmenté de 6,6 % pour atteindre 11,3 milliards de dollars. Les exportations vers la Russie ont augmenté de 115 % pour atteindre 9,3 milliards de dollars.
Concernant les relations commerciales chinoises avec notre pays, selon les douanes françaises les exportations françaises vers la Chine ont baissé en 2022 de -1,3 %. Celles des produits de luxe font cependant exception en résistant l’année dernière (+2,0 % par rapport à 2021 et ont plus que doublé par rapport à 2019) celles des ventes aéronautiques (de loin le premier poste de nos exportations en Chine) résistent aussi avec une augmentation de +2,4 %. Les importations françaises de biens chinois ont, elles, bondi en 2022 de +20,7 %.
Avec la fin de la politique zéro covid, la croissance de la Chine était pourtant attendue à la hausse. Après avoir été la grande gagnante de l’année 2020, les indicateurs économiques chinois sont cependant en berne ces derniers mois, révélant les failles de ce géant économique. Du premier au second trimestre 2023, le PIB du pays n’a progressé que de 0,8 %. « Après de nombreuses années à être l’usine du monde et à afficher 10 % de croissance annuelle, la Chine a un peu arrêté de pédaler » déclarait récemment un spécialiste de l’empire du Milieu.
L’économie chinoise présente aujourd’hui de grandes fragilités. Il est vrai que le pays a longtemps bénéficié de la mansuétude des pays occidentaux pour développer son industrie et ses échanges. L’arrivée de Donald Trump aux Etats Unis a marqué une rupture. La multiplication des sanctions commerciales pèse désormais sur ses échanges et son activité. Par ailleurs, alors qu’un quart de son PIB était tiré du marché de l’immobilier et de la construction, la Chine fait désormais face à une crise immobilière sans précédent avec des géants du secteur qui semblent tomber en faillite partielle (voir totale) comme des dominos.
Enfin la Chine se reposait beaucoup sur ses exportations face à une consommation intérieure qui fonctionnait mal. Les autorités chinoises ont échoué pour le moment dans le développement d’une demande intérieure qui devait prendre le relais de ces exportations. Dans un discours vidéo prononcé lors du Sommet mondial sur le commerce des services de la CIFTIS 2023 il y a quelques semaines, le président chinois s’est engagé à « travailler avec tous les pays et toutes les parties pour faire progresser le développement inclusif grâce à l’ouverture, promouvoir la connectivité et l’intégration grâce à la coopération, encourager les moteurs du développement grâce à l’innovation et créer un avenir meilleur grâce aux services partagés, dans le but de mettre collectivement l’économie mondiale sur la voie d’une reprise durable. A cette occasion la Chine qui entretient des relations commerciales dans le domaine des services avec près de 240 pays et régions, a signé des accords bilatéraux de coopération dans le domaine du commerce des services avec 14 pays. Xi Jinping a également indiqué que la Chine améliorerait la voie du développement axé sur l’innovation et le numérique.
Si la Chine se retrouve désormais dans une compétition qu’elle n’avait pas connue avant, bien loin de son ancien statut d’atelier du monde, elle sait que pour garder sa place de géant économique elle doit miser sur son interdépendance avec des pays étrangers et, en particulier, le marché occidental. L’inverse est aussi vrai. Les difficultés de l’économie chinoise ne sont pas sans incidences pour les autres pays. Deuxième puissance économique mondiale derrière les États-Unis, la Chine reste la première puissance industrielle et commerciale mondiale. Un ralentissement de la croissance en Chine pèse lourdement sur le cours des matières premières et de l’énergie. Il est vrai que le pays consomme près d’un cinquième du pétrole mondial, la moitié du cuivre raffiné, du nickel et du zinc. Des pays comme la Zambie ou l’Australie dépendent largement des importations en matières premières de la Chine. Plus près de nous, l’Allemagne est également exposée, la Chine étant devenue au fil des années son premier client (voitures de luxe, machines-outils, médicaments…). La Chine, qui a investi en Afrique, en Asie, mais aussi en Europe, confrontée à une crise économique majeure, pourrait aussi réduire ses investissements à l’étranger.
Cependant il reste pour l’empire du Milieu des indicateurs optimistes. La Banque mondiale a déclaré cette semaine que, selon ses prévisions, la croissance du produit intérieur brut mondial tomberait à 2,1 % en 2023 et à 2,4 % en 2024, contre 3,1 % en 2022. La Chine devrait faire exception, avec une croissance attendue de 5,6 % cette année et encore de 4,6 % l’année prochaine.