Le monde produit aujourd’hui deux fois plus de déchets plastiques qu’il y a vingt ans. Ils sont en grande partie mis en décharge (50%), incinérés (19%) ou ont été abandonnés dans des décharges sauvages, brûlés à ciel ouvert ou rejetés dans l’environnement (22%). Seuls 9 % sont effectivement recyclés, constate l’OCDE dans un nouveau rapport « perspectives mondiales du plastique« .
Sur 460 millions de tonnes produites en 2019 dans le monde, la production de déchets s’est établie à 353Mt, dont 22 % ont donc été mal gérés ou rejetés dans l’environnement.
Pour faire face à ces doubles conséquences en matière de pollution et de climat « il sera primordial que les pays répondent par des solutions mondiales et coordonnées, » écrit Mathias Cormann, le patron de l’OCDE.
Les experts de l’organisation proposent donc une série de « leviers« , à commencer par le développement des marchés de plastiques recyclés, qui ne représentent encore que 6% des matières utilisées, notamment en raison d’un coût souvent supérieur à celui d’une production primaire. Ils suggèrent notamment de multiplier les filières à « responsabilité élargie du producteur » sur la gestion des déchets, ou d’imposer des seuils minimaux d’utilisation. Plus de 120 pays interdisent déjà ou taxent certains plastiques à usage unique, mais ces mesures sont insuffisantes pour réduire la pollution globale. Une approche internationale de la gestion des déchets devrait aboutir à la mobilisation de l’ensemble des sources de financement disponibles, dont l’aide au développement, pour aider les pays à revenu faible et intermédiaire à faire face à leurs coûts d’amélioration des infrastructures de gestion des déchets.
« La réduction de la pollution plastique nécessitera d’agir – et de coopérer au niveau international – pour faire baisser la production de plastiques, notamment par l’innovation, l’amélioration de la conception des produits et du développement de substituts respectueux de l’environnement, ainsi que d’améliorer la gestion des déchets et de développer le recyclage », souligne le rapport.
L’offre de recyclage chimique en France est en plein essor.
« Ils choisissent la France ! » s’était enthousiasmé Emmanuel Macron le 17 janvier dernier, à l’annonce de l’arrivée de la « plus grande plateforme européenne de recyclage du plastique ». Sur les 4 milliards d’euros apportés par les 21 entreprises étrangères dans le cadre du programme « Choose France » promu par le président de la République, plus de 1 milliard d’euros sera consacré au recyclage chimique. L’entreprise américaine Eastman et la société québécoise Loop Industries en Normandie viendront notamment « valoriser » au plus près de leur production les déchets plastiques des Français.
Par ailleurs, et il s’agira d’une première mondiale, Carbios va construire la première usine au monde à l’échelle industrielle recyclant les déchets en PET (polymères plastiques et textiles) grâce aux enzymes. Elle sera en Meurthe-et-Moselle, sur le site du plus gros producteur mondial de PET, Indorama, qui utilisera la matière recyclée afin de fabriquer des emballages alimentaires ou des fibres textiles polyester. Ce projet à 150 millions d’euros recyclera 50.000 tonnes de déchets par an à partir de 2025 et créera 150 emplois directs et indirects.
Le Japon multiplie lui aussi les initiatives…
100% de contenants et d’emballages réutilisables, recyclables ou biodégradables : voici l’objectif du groupe japonais Shiseido d’ici 2025. Pour mener à bien ce défi, le groupe a annoncé un partenariat avec R Plus Japan Ltd, une société japonaise spécialisée dans le développement de technologies écoresponsables, elle-même associée à Anellotech Inc., entreprise de biochimie américaine. Les deux entreprises ont pour objectif de mettre au point un procédé de recyclage thermocatalytique permettant de convertir les plastiques à usage unique en produits chimiques de base afin de les recycler en nouveaux plastiques.
En Afrique, débute un cycle de négociations qui visent à aboutir à un traité international
Quelque 300 millions de tonnes de déchets plastiques sont produites chaque année dans le monde, dont 11 millions finissent dans les océans, mais selon l’ONU, « le manque de statistiques » concernant l’Afrique « est un obstacle majeur ». Autre obstacle, le manque d’engagement de certains pays en partie lié à l’impact économique et social du secteur du plastique qui crée de l’emploi dans plusieurs d’entre eux, dont l’Afrique du Sud où il fait travailler quelque 65.000 personnes.
L’Afrique, qui réceptionne déjà des produits toxiques au rebut venus d’ailleurs, deviendra-t-elle, en plus, « la poubelle du monde » des déchets plastiques ? A l’Assemblée de l’ONU pour l’environnement qui s’est ouverte cette semaine à Nairobi, les pays africains tenteront de s’unir pour l’éviter. Ils essaieront de parvenir à une position commune sur l’interdiction d’importer des déchets plastiques sur le continent, en vue de pourparlers pour un accord international contre la pollution du plastique.
« La pollution plastique s’est développée au point de devenir, elle aussi, une véritable épidémie », indique Espen Barth Eide, la présidente de l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement. Greenpeace Afrique parle de « bombe à retardement mortelle ».
Concrètement, l’assemblée devrait adopter une motion créant un Comité intergouvernemental de négociation, en vue de l’élaboration d’un traité « fort et juridiquement contraignant » sur la pollution plastique, avec pour échéance possible la prochaine assemblée environnement onusienne, dans deux ans.