La Commission économique pour l’Afrique (CEA) en collaboration avec le ministère de l’Environnement, du Changement climatique et des Forêts du Kenya et avec le soutien de l’Alliance panafricaine pour la justice climatique (PACJA) organise cette semaine la 11ᵉ Conférence sur le changement climatique et le développement en Afrique à Nairobi (Kenya) autour du thème : « Solidarité africaine pour l’action mondiale contre le changement climatique. »
En prélude à ce sommet le président kényan William Ruto a affirmé que l’Afrique pouvait réussir à dépendre entièrement des énergies renouvelables. « Le continent dispose d’un potentiel suffisant pour être entièrement autosuffisant grâce à un mélange d’énergie éolienne, solaire, géothermique, de biomasse durable et d’hydroélectricité ». Il a promulgué la semaine dernière une loi sur le changement climatique 2023, ouvrant la voie à la réglementation des marchés du carbone. Après l’Afrique du Sud, l’Inde et le Vietnam, cette nouvelle loi a pour ambition de permettre au Kenya d’obtenir des fonds pour lutter contre le changement climatique. Elle prévoit également de créer un registre national des émissions de gaz à effet de serre qui facilitera le commerce des crédits carbone.
Aujourd’hui le Kenya est un des rares pays à disposer d’une énergie quasiment à 90% renouvelable. 50% de l’électricité produite dans le pays provient de la géothermie. L’utilisation des eaux chaudes du Hell’s Gate font aujourd’hui du pays le premier producteur africain de géothermie et le 7e mondial.
Même si c’est au Kenya que les habitants disposent d’un des taux le plus élevé au monde d’énergie issue des panneaux solaires, des progrès restent à faire dans ce domaine. La technologie solaire importée au Kenya continue d’être taxée par des droits d’importation et les consommateurs doivent supporter le coût élevé de ce passage à l’énergie verte. La fiabilité de l’énergie solaire et son faible coût, malgré un capital d’installation initial élevé, ont plutôt attiré les aciéries et les usines d’huile comestible. La production d’énergie solaire du pays est passée de 7,44 millions de kilowattheures (kWh) par mois en 2021 à une moyenne de 30 millions de kWh par mois actuellement, selon l’EPRA (l’Autorité de Régulation de l’Énergie et du Pétrole). La moitié de cette énergie solaire générée provient de la Centrale Solaire de Garissa, contribuant à 2 % du mix énergétique national. Cette installation de 55 mégawatts (MW) est indiquée comme la « plus grande centrale solaire connectée au réseau en Afrique de l’Est et centrale ». D’une valeur de 136 millions de dollars et couvrant une superficie de 35 hectares, elle a été financée par la Chine.
Le Kenya se positionne donc comme pionnier dans la lutte contre le changement climatique. Le ministre de l’Industrie et des Technologies avancées et président désigné de la COP28, Dr. Sultan bin Ahmed Al Jaber a ailleurs indiqué cette semaine que « le Kenya se rapprochait de son objectif de 100 % d’énergie propre d’ici à 2030 ». En interne tout n’est pas si évident. La dette publique du Kenya a atteint un niveau historique de 10.100 milliards de shillings (64,1 milliards d’euros) venant menacer la situation économique déjà fragile du pays. Le gouvernement a d’ailleurs été contraint cet été de prendre une décision inattendue en réintroduisant une modeste subvention sur l’essence. Une volte-face sur sa politique récente visant à stabiliser les prix à la pompe pour les semaines à venir. L’objectif affiché de William Ruto est donc maintenant de partager les technologies, et d’attirer les investisseurs verts pour freiner le dérèglement climatique en évitant de trop peser sur son économie.
L’agence des Nations unies pour l’environnement indique que 60 % des meilleurs sites solaires du monde se trouvent en Afrique et qu’il existe encore un grand potentiel, car cette énergie n’est exploitée qu’à hauteur de 1 %. Le continent n’a toutefois qu’une capacité installée similaire à la Belgique, ont souligné récemment le président kényan et le patron de l’Agence internationale de l’énergie. En cause, notamment : seuls 3 % des investissements mondiaux de la transition énergétique arrivent en Afrique, ont-ils déclaré.
Prochaine étape : la 28ème Conférence des Parties sur le Climat de l’ONU (COP 28) qui se déroulera du 30 novembre au 12 décembre prochain à Dubaï, aux Émirats Arabes Unis.