Une stratégie qui est « bonne pour beaucoup, mais pas pour tous ». Tel est le titre et la principale conclusion de l’enquête que vient de mener la Chambre européenne de commerce en Chine sur le choix, ou non, des entreprises européennes de conduire des activités de R&D en Chine.
Avec le « Mercator institute for China studies », la Chambre qui jouit d’une influence certaine à Pékin a interrogé 32 de ses membres sur leur approche du sujet et leur appréhension des risques, notamment en matière de protection intellectuelle.
« Pour les entreprises européennes, comprendre comment maximiser leur participation au système d’innovation chinois, particulièrement dynamique, est un impératif, estime ainsi Jörg Wuttke, président de la Chambre et par ailleurs, représentant de BASF en Chine.
De fait, la plupart des entreprises interrogées pour l’étude considèrent qu’il y a d’importants avantages à conduire de la R&D dans l’ex-Empire du milieu. Et elles veulent à l’avenir y accroître encore leurs dépenses consacrées à l’innovation. Ainsi, depuis deux ans, en pleine crise covid, 7 entreprises sur 10 interrogées ont augmenté leurs budgets !
En la matière, deux cas de figure se présentent. Le premier est celui des entreprises opérant dans les secteurs où les autorités chinoises encouragent l’investissement étranger (automobile, chimie, mécanique avancée…). Pour elles, l’accroissement de leur R&D est un choix clair et net. A l’inverse, dans les secteurs « sous pression » du pouvoir chinois qui, dans une approche protectionniste, veut clairement favoriser ses entreprises nationales, la situation est plus difficile. Paradoxalement, c’est dans le domaine des technologies de l’information sur lequel la Chine estime ne plus avoir de retard, que les entreprises européennes sont les plus pessimistes quant à l’avenir de leurs activités de R&D.
Par ailleurs, tout secteur confondu, plus de 80% des entreprises interrogées se plaignent d’un traitement inégal de la part des autorités, notamment en matière d’accès aux subventions publiques. De plus, si le cadre légal de la propriété intellectuelle a évolué de façon favorable ces dernières années, un tiers des entreprises le juge encore trop peu protecteur. Sans parler des fuites de secrets industriels, une pratique persistante.
A noter que l’enquête met en évidence la difficulté croissante des acteurs européens à obtenir le statut d’entreprise innovante dit HNTE (High and New Technology Enterprise). Ce statut confère un IS à 15% contre 25% pour le droit commun. Il est aussi de plus en plus difficile à conserver avec, par exemple, trois revues annuelles des travaux par les autorités ou encore des exigences de plus en plus fortes sur le niveau technologique des projets.
En la matière, dans beaucoup de métiers, les entreprises européennes considéraient traditionnellement qu’avoir une ou deux générations d’avance en matière de technologies permettait de tenir à distance leurs compétiteurs chinois. Mais « ce n’est plus suffisant », estime la Chambre, au vu de la montée en gamme constante de l’écosystème d’innovation.
Pour rappel, la Chine représente environ 20% des dépenses mondiales de R&D. En 2021, celles-ci ont encore bondi de 14% à 441 milliards de dollars, selon le Bureau national de la statistique chinois, un nouveau record historique. Rapportées à la richesse nationale, les dépenses de R&D représentaient l’an dernier 2,44% du PIB chinois contre seulement 0,9% en 2001