INTERVIEW
Axel Baroux est directeur de Business France pour l’Afrique. S’il est optimiste sur le rebond, il reste très prudent sur l’économie du continent africain en 2020 qui va connaître, à l’instar de l’économie mondiale, une récession.
« Seuls devraient échapper à la récession le Sénégal, la Côte d’Ivoire, l’Ouganda, l’Ethiopie et peut-être le Kenya » explique-t-il. « Mais la capacité de résilience et d’adaptation du continent est remarquable. Le FMI a donné une projection de croissance de 4% dès 2021. « La vraie problématique reste le manque de vols aériens », reprend-il. « Les marchandises circulent, les cargos livrent. On espère que prochainement les vols vont fortement augmenter et les quatorzaines être supprimées, mais on navigue à vue en fonction des pays.» Air France programme une réouverture sur 32 destinations cet automne, une dizaine pour Brussel Airlines, mais aujourd’hui seule Ethiopian Airlines a maintenu ses vols et a laissé son Hub ouvert.
Sur le sujet de l’annulation de la dette. « La France a obtenu un moratoire sur le sujet de la dette, c’est déjà une très bonne chose, dans un temps aussi court. Des mesures fortes vont conforter la situation des Etats Africains. La France montre l’exemple, je pense notamment aux financements de 1,2 Milliards d’euros de l’AFD. D’autres bailleurs de fonds se sont mobilisés, les conditions d’obtention des prêts sont moins fortes. A titre personnel je pense qu’on n’évitera pas une sorte de plan Marshall pour le continent. »
« La Banque mondiale a annoncé le lancement d’un programme de 500 M USD destiné à aider les pays d’Afrique et du Moyen-Orient à lutter contre les nuées de criquets pèlerins (appui aux agriculteurs, aux ménages ruraux…). La Banque africaine de développement a dévoilé, vendredi 5 juin à Abidjan, une feuille de route stratégique pour aider les pays africains à faire face aux effets de la crise du Covid-19 en matière de nutrition et de sécurité alimentaire … »
« On sent depuis quelques semaines des frémissements sur le continent. Deux secteurs n’ont pas été touchés : la santé et l’agroalimentaire, je discute avec des entreprises qui ont un fonctionnement quasiment normal. »
« Je pense que l’on va assister début 2021 à une hausse très forte de la demande. Les opportunités ne manquent pas, et ne manqueront pas, sur pratiquement tous les secteurs d’activité : Santé et dispositifs médicaux ; Industries agricoles et agroalimentaires ; Industries et services essentiels (environnement, énergie et EnR, transports et mobilités urbaines, gestion des eaux et déchets…) ; Technologies et services (dont formation et éducation, logiciels et télécommunications, commerce et e-commerce…) ; Biens de consommation et art de vivre, pour répondre aux besoins et attentes d’une classe moyenne toujours plus large.
Pour ce qui est des infrastructures cela va dépendre de la capacité des états à lever de la dette, mais au pire ce sera des retards dans les programmes. »
Il n’y a que le secteur du retail sur lequel Axel Baroux est circonspect. « En Afrique du Sud notamment le retail connait une crise profonde et la baisse du pouvoir d’achat va entraîner des arbitrages dans le budget des ménages. »
« En Afrique, contrairement à l’Europe où on parle de relocalisation, c’est le besoin d’investissements étrangers qui est le principal sujet pour stabiliser de l’emploi et ramener de la valeur ajoutée sur le continent. La partie partenariat, coopération croisée, est une des clés commerciales pour pénétrer les marchés africains. C’est déjà une réalité sur l’Afrique du Sud, c’est une pratique très répandue dans les appels d’offres publics. »
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