Le report d’un an à 2023 de l’entrée en exploitation du projet gazier Sénégalais et Mauritanien de Grand Tortue annoncé par BP en mai dernier n’est sans doute que le début d’un grand déballage annoncé dans le monde de l’exploitation pétrolière et gazière qui n’est pas sans inquiéter de nombreux observateurs sur la capacité financière des pays concernés.
La chute des prix du gaz et du pétrole et la crise du Covid a pour conséquence la révision par plusieurs majors de leurs plans d’investissements. Après le report de l’exploitation pétrolière de Sangomar au Sénégal par l’australien Woodside c’est au tour de BP d’annoncer le décollage de l’entrée en exploitation du projet gazier de Grand Tortue. Ce décalage est selon BP dû à des problèmes logistiques d’approvisionnement en matériel pour l’exploitation et non à un désinvestissement de la compagnie. En cause Eiffage qui n’a pas pu construire à temps la digue brise lame et Golar le norvégien qui a pris du retard sur la construction de la barge d’exploitation. Même si le gouvernement Sénégalais reste serein cela va tout de même décaler l’accès à la manne pétrolière du Sénégal d’au moins une année ce qui n’est pas sans conséquences dans un contexte Covid faiblement maîtrisé au Sénégal.
Coté pétrolier les choses sont plus compliquées car la baisse de la demande mondiale est réelle et la rentabilité théorique de l’exploitation du pétrole sénégalais serait remis en cause par rapport aux cours mondiaux qui risquent d’être durablement assez bas. Il y aurait selon des spécialistes de l’Institut du Pétrole une différence de 10 à 15$ le baril dans le coût d’exploitation par rapport aux champs existants dans les pays voisins. Le report d’exploitation risque donc de durer car tout cela a fragilisé le consortium emmené par Petrosen et Woodside avec la demande de retrait de certains partenaires du projet, ce qui remet en cause le financement de celui-ci.
Si les projets gaziers semblent donc solides au Sénégal et ne devraient pas trop déraper, il convient de rester plus prudent sur le pétrole. En attendant le Sénégal a consolidé son mix énergétique sur le solaire et attend impatiemment l’exploitation gazière pour accentuer sa production électrique gazière et faire ainsi baisser fortement le coût de l’énergie dans le pays.