C’est là le sens des propositions chocs de réformes annoncées au cœur de l’été. Le 13 août, le Conseil des affaires de l’État, autrement dit le gouvernement que dirige le Premier ministre Li Qiang, a publié un document en 24 points intitulé : « Avis sur l’optimisation continue de l’environnement des investissements étrangers et l’intensification des efforts pour attirer les investissements étrangers »
Ces avis sont rédigés sous forme de recommandations et non de lois. Mais le texte, « guidé par la pensée de Xi Jinping sur le socialisme à la chinoise pour une nouvelle ère », constitue, selon les experts, une des avancées les plus significatives en matière de libéralisation de l’économie, au moins depuis le début de la période covid. Il dessine une sorte de cadre de travail idéal pour les entreprises étrangères qui devra toutefois se confronter au réel. Les 24 avis doivent, notamment, servir de lignes directrices pour les pouvoirs provinciaux et municipaux.
D’une manière générale, le pouvoir chinois promet de faciliter l’investissement étranger, de renforcer sa protection et d’assurer un traitement « national » aux entreprises à capitaux étrangers, en particulier dans les secteurs de pointe (industrie 4.0, biomédecine, numérique, etc…). Des engagements réclamés de longue date, sans grand succès, par les représentants des investisseurs internationaux, comme la Chambre de Commerce européenne en Chine ou encore l’American Chamber of Commerce in China.
Dans le détail, différents secteurs ou domaines transversaux sont couverts par ces avis. Un des plus significatifs tient à la promesse d’offrir une compétition égale aux marchés publics que les entreprises soient chinoises ou non. Cette égalité d’accès est une vieille demande des investisseurs étrangers, jamais satisfaite. Le pouvoir central promet même de mener des inspections auprès des autorités provinciales ou locales pour vérifier la participation équitable des entreprises étrangères aux marchés publics et leur non-traitement différentiel. Ces entreprises seront, selon le document « légitimes à poser des questions aux administrations concernées ou à déposer des plaintes dans les cas où les conditions des marchés publics [portent] atteinte à leurs droits ». La norme fixant, pour certains marchés publics, une limite minimale de 50% de produits ou composants chinois pourrait être également assouplie.
Le gouvernement promet aussi de garantir, sauf disposition spécifique (par exemple en matière de défense), l’accès des entreprises étrangères aux mesures de relance économique.
Par ailleurs, une autre demande récurrente des investisseurs, les droits de propriété intellectuelle et la lutte contre la contrefaçon seraient renforcés, de même que la lutte contre la désinformation en ligne, fréquente à propos des marques non chinoises. De plus, les entreprises étrangères devraient pouvoir participer « équitablement » à l’élaboration des normes industrielles.
En matière de R&D, le texte promet, par divers leviers, de favoriser l’investissement et la création de centres de recherche par les entreprises étrangères, notamment les grands groupes. Il les encourage à mener des travaux conjoints avec les sociétés chinoises.
Beaucoup de groupes comme Schneider, General Motors, Siemens ou Volkswagen ont, en fait, de longue date engagé des stratégies en ce sens et investi dans des centres de R&D en Chine. Mais, ces dernières années, une part des investisseurs étrangers a eu tendance à lever le pied ou revoir leur stratégie, en raison de la politique de plus en plus nationaliste de l’administration Xi et des tensions avec les Etats-Unis sur la technologie.
Dans le cadre « des politiques fiscales préférentielles pertinentes », les centres de R&D d’entreprises à capitaux étrangers pourraient aussi bénéficier plus facilement de certaines exonérations de taxes, en particulier sur les achats d’équipements. A noter que sur le thème de la R&D, la santé et les biotechnologies sont pointés comme des secteurs à favoriser. Il s’agit d’accélérer « la mise en œuvre et la mise en service de projets à capitaux étrangers dans le domaine de la biomédecine, encourager les entreprises à capitaux étrangers à mener des essais cliniques sur les médicaments de thérapie cellulaire et génique commercialisés à l’étranger conformément à la loi », indique un des avis.
Dans l’univers numérique, le Conseil des affaires de l’Etat promet, par ailleurs, d’améliorer les procédures de transfert transfrontalier des données et l’autorisation de stockage hors de Chine. Ces procédures sont devenues particulièrement complexes pour les entreprises étrangères depuis l’entrée en vigueur, en 2021, de la loi chinoise sur la sécurité des données (DSL), assez proche du RGPD européen. Certaines villes et régions d’importance majeure comme Beijing, Shanghai, Tianjin ou la Grande Baie (Canton, HongKong…) sont désormais encouragées à créer des listes de données pouvant être transférées avec peu de restrictions.
Dans le secteur de l’énergie, le document encourage les entreprises étrangères à accélérer leur décarbonation et le recours aux renouvelables. Au-delà de cette position de principe, dans le cadre du marché national du carbone créé en 2021, leur accès aux certificats d’électricité verte et aux programmes interprovinciaux et transversaux d’échange d’énergie verte sera encouragé.
Enfin, dans un domaine très pratique, le texte gouvernemental promet de faciliter la délivrance de visas d’affaires et de permis permanents de résidence pour les cadres des entreprises étrangères et leurs familles. Il fait également mention des exonérations fiscales personnelles dont peuvent bénéficier ces expatriés, alors que se profile pour le 31 décembre 2023 la fin d’un système d’indemnités non-imposables pour les employés étrangers.