Après une période d’amélioration (2013-2017) suivie d’une dégradation (2018-2020), les créations d’usines ont fortement augmenté en France en 2021, avec un solde positif de 120 usines nouvelles (176 créations et 56 fermetures). Un record et un niveau que le pays n’avait plus connu depuis 11 ans selon l’observatoire de l’industrie Trendeo. Alors que les deux quinquennats précédents ont connu, eux, environ un millier de fermetures d’usines chacun, les ouvertures d’usines ont été plus nombreuses que les fermetures ces cinq dernières années : 646 créations contre 490 disparitions.
Appétit croissant pour le « Made in France », contexte règlementaire plus favorable aux entreprises mais aussi soutien de l’Etat aux réindustrialisations (2,9 milliards d’euros de subventions dans le cadre du plan « France Relance » en 2021) après une crise sanitaire qui a mis en lumière la dépendance du pays vis à vis de l’étranger… Les raisons de ce début de réindustrialisation sont multiples.
Du luxe avec « Hermès », à l’agroalimentaire avec le groupe laitier « LSDH », en passant par l’automobile avec « Faurecia », la plupart des secteurs ont annoncé ou bouclé d’importants projets d’investissements en France. L’an dernier, les relocalisations d’entreprises (les rapatriements de production que des entreprises françaises faisaient elles-mêmes ou sous-traitaient à l’étranger) ont « fortement augmenté » passant de 30 en 2020 à 87 en 2021. Elles vont de la marque de chaussures « Weston » à Limoges (Vienne) qui rapatrie du Portugal la fabrication de ses baskets, à « NWL France production », fabricant des stylos Waterman, qui compte relocaliser ses activités de Chine à Saint-Herblain (Loire-Atlantique).
Plus de sites, mais aussi plus d’emplois industriels… En 2021, le solde entre créations et destructions d’emplois a été positif à hauteur de 32.155 emplois contre 16.000 destructions nettes recensées en 2020.
Globalement, avec ces 32 155 emplois nets créés en 2021, la production industrielle française fait presque aussi bien que le numérique (33 535 emplois nets créés l’an passé) et dépasse les services (+28 159 emplois), la logistique (+14 593), les commerces (+4 350), l’énergie et les traitements de déchets (+2 467 emplois). Dans l’industrie, le premier secteur créateur d’emplois l’an dernier a été celui du cuir et de la chaussure (5 513 emplois nets nouveaux créés) puis les industries alimentaires (5 169 emplois nets) et les équipements électriques avec 3 245 créations nettes d’emplois.
Des résultats encourageants donc, mais qui devront s’inscrire dans la durée pour permettre au pays de regagner des parts de marché perdues par l’industrie française depuis 20 ans. Notre pays qui pesait pour près de 18% dans les exportations de la zone euro en 2000 est tombé sous les 13% en 2021 selon Eurostat.
Tous les clignotants sont loin d’être au vert. D’une part, si la France se réindustrialise, ses voisins aussi, et parfois plus vite encore. La part de la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière française dans celle de la zone euro diminue de 14,7% en 2019 à 13,9% en 2021, en témoigne le déficit commercial record de près de 85 milliards d’euros enregistré par le pays l’année dernière. D’autre part, la fiscalité sur les entreprises reste un frein au redressement de la compétitivité française. « Le poids des impôts de production qui portent sur le chiffre d’affaires des entreprises et non sur le bénéfice comme l’Impôt sur les sociétés reste parmi le plus élevé en Europe. Ils représentent l’équivalent de 4,4% du PIB contre 2,1% en Espagne, 2,5% en Italie ou encore 0,7% en Allemagne » selon l’Institut Montaigne. Enfin, autre fragilité du mouvement qui semble s’être enclenché, « la France reste encore absente des grands projets industriels à plus de 250 emplois, qui s’inscrivent surtout dans l’est de l’Europe ».
Restent que certains signes redonnent de quoi espérer: La dynamique de créations nettes d’emplois hebdomadaires par exemple est supérieure de 240% depuis le début de l’année par rapport à la même période de 2021, et puis un budget de 34 milliards d’euros est déjà prévu dans le cadre du récent programme « France 2030 » destiné à renforcer notre compétitivité dans les technologies du futur. De nombreuses industries devraient pouvoir en bénéficier.