Si la sortie de crise sanitaire a été rapide et la reprise économique forte, un rapport d’Euler Hermès pointe du doigt un rebond des défaillances d’entreprise en 2022. Des défaillances inégales selon les régions du monde où les pays émergents sont les premières victimes.
900 milliards de dollars aux Etats-Unis, 540 milliards d’euros en Europe, 206 milliards d’euros en France… Ce sont autant d’aides publiques destinées à aider les entreprises pour faire face à la crise sanitaire de Covid-19. Des mesures de soutien qui ont permis de maintenir une activité économique a minima et d’éviter des fortes vagues de défaillances d’entreprises en 2020.
Le rapport note qu’à l’échelle mondiale, les défaillances d’entreprises ont reculé de -12% en 2020. Une tendance qui se confirmera en 2021 (-6%) du fait de la prolongation de nombreuses mesures publiques qui permettent de réduire la pression sur la trésorerie des entreprises.
« En 2020, les soutiens publics déployés ont permis d’éviter une défaillance sur deux en Europe de l’Ouest et une défaillance sur trois aux Etats-Unis », explique Maxime Lemerle, Directeur des recherches sectorielles et défaillances chez Euler Hermes.
Toutefois, les gouvernements annoncent au fur et à mesure de la sortie de crise, un retrait de ces mesures. La perfusion prend fin et à quel prix ? Le leader mondial de l’assurance-crédit prévoit une hausse des défaillances à l’échelle internationale de +15% en 2022, après deux années de recul prononcé.
Une résurgence des défaillances d’entreprises hétérogène selon les régions du monde
Le nombre d’entreprise à mettre la clé sous la porte dépendra de la vitesse du retrait de ces dispositifs étatiques. En effet, dans les régions où les mesures étatiques ont été moins généreuses, la normalisation des niveaux de défaillances d’entreprises a déjà commencé.
Par exemple, chez les émergents d’Afrique, les niveaux de défaillances pré-crise seront rattrapés dès cette année, note le rapport. Le record revient à l’Inde qui verra ses défaillances d’entreprises croitre de +69% en 2022. Cela s’explique par une sortie de crise rapide et d’une reprise économique forte mais avec des mesures d’aide publique moindres.
Les pays d’Europe de l’Ouest, du fait de forte mesures publiques de soutien , voire de leur extension (cf. plan de relance Next Génération EU de 806,9 milliards d’euros), mettront plus de temps à retrouver des niveaux de défaillances similaires à ceux de 2019.
Enfin, aux Etats-Unis, les défaillances d’entreprises resteront à un niveau bas en 2021 et 2022, principalement grâce au soutien public massif déployé et à un rebond économique particulièrement fort, le plus rapide jamais enregistré lors des 3 dernières décennies.
Fait encourageant, même si les défaillances d’entreprises augmenteront de 15% en 2022 à l’échelle mondiale, elles resteront inférieures de -4% par rapport à leur niveau de 2019.
Un rebond de 40% des défaillances d’entreprises françaises attendu en 2022
En France, le soutien massif aux entreprises a pour conséquence un recul de -38% des défaillances d’entreprises en 2020. Pour rappel, 9% du PIB français a été mobilisé à la fin mars 2021 pour venir en soutien aux entreprises. Les quatre mesures principales de soutien aux entreprises étaient l’activité partielle, le fonds de solidarité, les prêts garantis par l’Etat et les reports des cotisations sociales. Euler Hermès estime que l’ensemble de ces dispositifs ont permis d’éviter plus d’une défaillance d’entreprise sur deux en 2020.
Néanmoins, cette perfusion a ses limites :
« Nous prévoyons un fort rebond des défaillances en France en 2022, de l’ordre de +40%. Ce rebond ne sera pas suffisant pour rattraper les niveaux de 2019. Toutefois, il est annonciateur d’une tendance : une reprise lente, mais progressive et durable, de la recrudescence des défaillances d’entreprises en France, synonyme de résurgence du risque d’impayés », répond Ana Boata, Directrice de la recherche économique d’Euler Hermès.
Mettre la clé sous la porte à cause de quoi ?
L’évolution des défaillances d’entreprises dans les prochains mois sera dictée par plusieurs facteurs.
C’est d’abord la dynamique de la reprise économique mondiale. Cette dernière jouera un rôle important dans la façon dont les Etats retireront les mesures publiques de soutien. Et ce rythme de retrait aura un impact sur le rythme auquel les entreprises devront puiser dans leurs trésoreries.
De plus, de nombreuses entreprises demeurent encore en situation de fragilité. C’est notamment le cas des ‘zombies pré-covid-19’, artificiellement maintenues à flot par les mesures publiques de soutien.
Enfin, la reprise rapide des créations d’entreprises aura un impact sur l’accroissement mécanique du nombre d’entreprises à risque. Cela s’illustre notamment dans les secteurs où des entreprises ont été créées pour répondre à des besoins immédiats pendant la crise mais dont la viabilité est incertaine indique le rapport.