En effet, si le Gouvernement peut, à juste titre, mettre en valeur l’amélioration de nos performances dans plusieurs domaines, comme le taux de croissance et l’emploi, le déficit record de nos échanges commerciaux enregistré en 2021 est venu nous donner un cinglant rappel à l’ordre. Notre commerce extérieur est dans le rouge depuis vingt ans, et l’alourdissement de la facture énergétique, incontestable au cours des derniers mois n’explique pas tout.
Si notre déficit global est de 85 milliards d’euros, il faut surtout noter qu’il est de 57 milliards sur la zone Euro ! La mère des batailles est donc d’abord à mener en Europe, sur les marchés de proximité, et ce ne sont pas les questions monétaires ou la concurrence des pays à bas coûts qui sont les principales sources de nos difficultés.
Quelles solutions ?
La réalité, que chacun perçoit, est que le commerce extérieur est un cruel révélateur de nos problèmes de compétitivité et de notre désindustrialisation, et c’est bien évidemment par là qu’il faut commencer. Il est donc essentiel de poursuivre les politiques de renforcement de la compétitivité-prix menés depuis quelques années, car même si nous sommes revenus en bonne position par rapport à nos concurrents allemands, d’autres pays comme l’Italie ou
l’Espagne restent mieux placés.
Mais il faut aussi renverser la tendance à la désindustrialisation que connait notre pays depuis au moins deux décennies. Pour exporter, il faut d’abord avoir des produits ou des services à vendre ! L’industrie allemande pèse deux fois et demi l’industrie française. Le potentiel exportateur n’est donc évidemment pas du tout le même. Il faut intensifier nos efforts de développement des industries d’avenir, comme le Plan France 2030 annoncé récemment, et qui vise à transformer des secteurs clefs de l’économie par l’innovation technologique. Il s’agit d’une œuvre de long terme, mais le redressement de notre appareil productif, et donc de notre commerce extérieur, est à ce prix.
En parallèle, il faut mener une politique déterminée et constante de promotion de l’export. Car même si les déterminants fondamentaux de nos performances sont de nature macro-économique, il existe toujours un potentiel de développement international inexploité.
Un ministère du commerce extérieur
Pour cela, il est essentiel de donner à la politique du commerce extérieur et de l’attractivité un caractère vraiment prioritaire, au sein de l’action économique de la France, ce qui n’a pas toujours été le cas. Afin d’afficher clairement cette priorité, il faut faire du Ministère du Commerce Extérieur un ministère de plein exercice, relevant directement du Premier Ministre.
Jusqu’ici, le commerce extérieur a changé de statut au gré des configurations ministérielles : Ministère, Ministère Délégué, Secrétariat d’Etat, rattachement à l’Economie, puis aux Affaires Etrangères… Nous avons même connu des périodes, assez brèves il est vrai, sans titulaire désigné, comme si le sujet avait tout simplement été oublié…
La prise en charge de ce portefeuille par une personnalité de rang ministériel est aujourd’hui nécessaire, car la tâche est vaste : représenter la France et défendre ses positons devant les instances européennes et internationales, participer au débat politique français sur des sujets qui font de plus en plus la une de l’actualité (Brexit, attitude vis-à-vis de la Chine, sanctions commerciales…), animer le dispositif de soutien à l’export et à l’attractivité, soutenir nos entreprises par des visites à l’étranger et la conduite de délégations…
Mobiliser toutes nos forces
Mais au-delà des questions d’organisation ministérielle et administrative, il faut que l’ensemble de nos forces soient mobilisées autour de cet objectif de redressement. C’est le cas par exemple de nos réseaux d’entrepreneurs français à l’étranger, notamment les Conseillers du Commerce Extérieur (CCE) et les Chambres de Commerce Françaises à l’étranger (CCI-FI ). Ce sont aussi tous les outils disponibles tant en matière d’accompagnement des PME (Team France Export ainsi que les acteurs privés) que de financement des exportations qui doivent être utilisés de manière plus offensive. La France dispose de tous les instruments nécessaires pour soutenir nos entreprises à l’export. Encore faut-il les utiliser sans pusillanimité.
Il n’existe pas de martingale pour régler le déficit du commerce extérieur. Mais l’exemple de la décennie 1990-2000 comme celui de nos voisins italien et espagnol montre aussi qu’il n’y a pas de fatalité du déficit. Mais cela suppose que le rétablissement de nos échanges ne soit plus considéré comme une question macro-économique secondaire mais comme une véritable priorité de l’action publique.